Le quotidien monopolistique et de tendance socialiste Sud-Ouest nous a gratifiés, le 9 août, d’un éditorial carabiné du dénommé Benoît Lasserre, intitulé « Antisémitisme, ça suffit ! ». Comme si, jusqu’à présent, l’antisémitisme était une opinion librement affichée, qu’il serait temps d’encadrer, voire d’interdire. Le « ça suffit » sous-entend en effet qu’il s’agir de mettre un terme à une pratique courante et libre.
Le perspicace Lasserre précise ensuite sa pensée : « il a fallu attendre mai 2022 pour que (…) Rivarol soit privé des aides de l’Etat à la presse [malgré] son antisémitisme crasseux ». Le même Lasserre évoque une quinzaine de condamnations de l’hebdomadaire, ce qui contredit son discours selon lequel Rivarol aurait bénéficié de soixante-dix années de tolérance de la part des pouvoirs publics. En l’occurrence le scandale est d’abord que des aides légales puissent être retirées à un journal légalement publié. En poursuivant dans la logique du sieur Lasserre, cela signifierait par exemple qu’un individu condamné pour les mêmes motifs devrait être privé des déductions fiscales pour l’emploi d’une femme de ménage, ou pour l’amélioration de l’isolation de sa maison. On voit l’absurdité du raisonnement.
Puis Lasserre s’en prend à Soral et Dieudonné, s’indignant qu’ils puissent encore avoir accès aux réseaux sociaux et que Dieudonné envisage de se produire au zénith avec Francis Lalanne. Par capillarité l’appel à censure touche aussi le malheureux Lalanne, et ses chansons un peu niaises, mais qui ne feraient pas de mal à une mouche.
Le très avisé Lasserre nous explique ensuite qu’applaudir Faurisson, ou soutenir Le Pen à propos de la polémique sur le détail de l’Histoire, ce sont des délits. Les décisions de justice relatives à ces affaires-là montrent que ces dossiers étaient complexes, et les décisions contestables. D’autre part ce qui était délit à une époque peut devenir un droit. Nous en avons par exemple pris acte, à notre grand regret, à propos de l’avortement ; mais les évolutions sur cette question, aux Etats-Unis, prouvent qu’il n’existe pas de lois humaines qui ne seraient susceptibles de s’inverser. Il n’y a que les lois naturelles qui sont immuables (encore certains tentent-ils de remettre en cause ces lois naturelles qui font par exemple que l’on nait garçon ou bien fille).
Le subtil Lasserre en vient enfin au vrai sujet : la dissolution de Civitas qui doit, selon lui, constituer le début d’un vaste mouvement de censures et d’interdictions. « Il ne faut plus laisser le moindre millimètre » aux antisémites, écrit-il.
Or le fabuleux Lasserre identifie les deux principaux promoteurs de l’antisémitisme dans le monde : d’une part Elon Musk qui grâce à X (ex-Twitter) ouvre tribune libre aux antisémites, et d’autre part Eric Zemmour, qui multiplie les « déclarations qui confortent les phobies antisémites ». Autrement décrit : boycottez les entreprises d’Elon Musk et interdisez de parole Eric Zemmour, et vous aurez résolu le problème de l’antisémitisme.
Les gênants petits oublis de Sud-Ouest
On pourra toutefois reprocher à Lasserre d’avoir oublié, dans sa très convaincante démonstration, de nous parler du meurtre antisémite de Mireille Knoll, du meurtre antisémite d’Ilan Halimi, des trois meurtres antisémites commis à Toulouse par Mohamed Merah en 2012, dont celui d’une petite fille de 8 ans, tuée de sang-froid d’une balle dans la tempe, des quatre assassinats antisémites de l’Hyper Cacher de la porte de Versailles, et aussi des « mort aux juifs ! » qui ont retenti lors de la manifestation islamo-progressiste parisienne de juillet 2014 etc. Nous avons là une liste de meurtres et d’appels au meurtre parfaitement caractérisés, mais qui semblent moins troubler Lasserre que les spéculations purement intellectuelles d’un Pierre Hillard.
De même la proximité de LFI avec des antijuifs avérés, et les invitations par LFI (voire par la NUPES toute entière) d’antisémites connus comme Houria Bouteldja, Jeremy Corbyn, Taha Bouhafs, ou le rappeur Médine Zaouiche, ne font ni chaud ni froid à notre bon Lasserre. Leurs « dérapages » sont pourtant d’une autre ampleur, d’une autre gravité, que ceux comptés au prétendu passif de Zemmour ou d’Escata, par notre scrupuleux comptable.
Dans sa conclusion, Lasserre s’indigne que Zemmour ait été innocenté par la justice pour ses « déclarations qui confortent les phobies antisémites ». A la vérité, en relisant l’éditorial lasserrien, on a bien compris qu’au fond, pour lui et pour les siens, il y a un bon et un mauvais antisémitisme, et il y a de bons et de mauvais juifs, voire des faux juifs, dont Eric Zemmour serait l’archétype. Les masques tombent.
Agathon
Merci pour cet article qui rappelle très bien l’essentiel à propos de l’état moral des journalistes de la presse subventionnée.
En particulier cet article démontre très bien que ce journaliste ne respecte pas le point « Devoirs #9 » de la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes (Munich, 1971).