Au début du XXIe siècle une affaire de « néonazis » avait secoué le département de l’Indre. Il se trouve qu’originaire de ce département je connaissais bien certains de ces prétendus « néonazis », accusés par les médias locaux de répandre la haine. Je connaissais en particulier celui qui était présenté comme le « chef » de ces « néonazis », le (alors) jeune Paul Thore. J’avais du mal à imaginer ce catholique engagé, hostile par principe à l’avortement, à l’euthanasie, à l’eugénisme, à toute hiérarchisation raciale, soudain converti au paganisme néo-hitlérien !
Pourtant les médias locaux, à commencer par La Nouvelle République, FR3, Le Berry Républicain, mais aussi des organisations politiques de gauche, la Ligue des droits de l’homme et toutes sortes d’autres groupes d’extrême gauche bénéficiant de financements publics et parapublics, nous annonçaient que des commandos terroristes d’extrême droite avaient été neutralisés du côté de Châteauroux. France Info (relayé par la plupart des médias français, mais aussi par nombre de médias à l’étranger) avait expliqué à ses auditeurs que les Berrichons n’étaient pas passés loin d’un coup d’Etat, en quelque sorte.
Des arrestations, de véritables rafles, furent opérées dans tout le département. Les présumés coupables avaient entre 16 et 25 ans. Les auditions de tous ces malheureux durèrent des semaines, et même des mois, et ont représenté un total de 5500 pages.
A moins qu’ils aient agi sur ordre venu de très haut, le procureur de la République, Pierre Valleix et le juge d’instruction chargé de l’affaire, Nicolas Léger, ont inventé de toutes pièces ou ont imaginé qu’il existait donc, entre Châteauroux et Mézières-en-Brenne, des « groupes de combat » berrichons, armés jusqu’aux dents, préparant une sanglante prise de pouvoir.
Un grossier montage
Pour ma part j’avais très vite acquis la conviction que nous avions affaire à un grossier montage, mené par quelques individus bien placés, encouragés par des journalistes sans éthique professionnelle, des liens secrets, politiques et/ou maçonnique unissant tout ce petit monde. « Un groupuscule néonazi démantelé dans l’Indre » titrait La Nouvelle République, qui fit de cette affaire son feuilleton du printemps 2021. « Fusils, roquettes, pistolets-mitrailleurs, …Les policiers ont découvert un véritable arsenal » expliquait le misérable quotidien monopolistique local. Mais tout était mensonger.
21 jeunes gens furent mis en examen au cours du mois de mars 2004, leurs noms jetés en pâture, et le chef présumé du pseudo-commando terroriste, Paul Thore, envoyé directement en prison. Paul Thore restera détenu pendant quatre mois et demi. Il faudra d’ailleurs le changer de prison car des détenus de droit commun étaient bien décidés à faire la peau au jeune « toubab » (un « Blanc » en argot islamiste). Toutefois une équipe d’avocats s’était mobilisée au profit de ces jeunes gens.
Tout cela, je l’ai raconté à l’époque dans la presse de droite. Mais l’information ne fut relayée nulle part ailleurs.
Faute d’armes, faute du moindre commencement de preuve pour appuyer les délires de La Nouvelle République, du procureur Valleix et du juge d’instruction Leger, les prisonniers finirent par être libérés, y compris Paul Thore, le prétendu chef du prétendu commando. Un vieux numéro de Paris-Match avec la photo du maréchal Pétain, un drapeau du Berry, des masques à gaz de la « défense passive », oubliés au fond d’un grenier, depuis 60 ans, des sacs de couchage et des rangers utilisés pour les pèlerinages de Chartres, des livres de Maurras et Daudet, pouvaient-ils décemment justifier des arrestations, des emprisonnements, un procès ?
Définitivement lavés de tout soupçon
Mais il fallut que Paul Thore et ses amis bataillent encore seize ans de plus pour qu’ils finissent par être totalement et définitivement lavés de toute accusation, de tout soupçon. Les dernières décisions de justice, dans ce dossier, sont tombées… le 26 mars 2021, soit 20 ans après les premières « instructions » ! Car tout était parti apparemment, de quelques autocollants apposés en 2001, qui fustigeaient … les pédophiles ! A l’époque critiquer la pédophilie était encore considéré, semble-t-il, comme une forme de discrimination, voire de néonazisme. Les affaires Epstein, Weinstein, Duhamel, n’avaient pas encore eu lieu.
20 ans d’instruction, 5500 pages d’auditions, tout cela pour rien. N’allez pas me soutenir ensuite que la justice manque de moyens !
Présent a raconté cette affaire sous forme de feuilleton en 2021, et c’est ensuite devenu un livre (1). Mais cette histoire mériterait un film. Nous n’avons malheureusement pas, en France, l’équivalent d’un Clint Eastwood pour tourner un film comme Le cas Richard Jewell, une affaire américaine qui offre quelques similitudes avec l’affaire Paul Thore.
Depuis lors, Thore a saisi la cour d’appel de Bourges pour être dédommagé du préjudice moral et pécuniaire découlant de « l’erreur » (volontaire) dont il a été la victime. Par ordonnance rendue le 12 décembre 2023, il a obtenu 22500 euros de dédommagements. 22500 euros payés par nos impôts…
Des Paul Thore, il y en a eu bien d’autres
Aujourd’hui père de 9 enfants, Paul Thore qui était gérant d’une pizzeria, n’entend pas en rester là. Il a perdu une partie de son chiffre d’affaires, sans parler des saccages de son restaurant commis par des militants d’extrême gauche. Et il n’a jamais pu retrouver un emploi en CDI, car les informations sur internet vous suivent à vie, en quelque sorte. A-t-on envie d’embaucher un individu accusé (même à tort) par les médias d’être un néonazi, et qui a fait de la prison pour cela ? Pas vraiment. Le principe de précaution joue à plein.
Aussi, pour Paul Thore, le combat continue. C’est un combat qui mérite d’être soutenu, tant il est emblématique de notre époque. Car des Paul Thore, il y en a eu bien d’autres. Mais encore faut-il avoir le courage et le mental pour se battre ensuite, pendant des années, pour enfin obtenir pleinement justice.
Francis Bergeron
- Histoire secrète des prétendus « néonazis » de Châteauroux (2001-2021), Ed. Dualpha, 2021.