Fut une époque où les bureaux du quotidien Libération servaient aussi de siège au Front de Libération des Pédophiles. Fut une époque où des pédophiles notoires travaillaient à Libération. Ils venaient à la rédaction, accompagnés de gamins de 13 ou 14 ans et ils expliquaient à une rédaction hilare et solidaire le rôle (immonde) que jouaient ces enfants, dans leur vie à eux. Libération n’est donc pas forcément le mieux placé pour crier au scandale face à des actes pédocriminels.
Or c’est Libération qu’une femme nommée Inès Chatin a choisi pour venir raconter des actes pédocriminels dont elle aurait été la victime alors qu’elle était mineure, qui auraient été commis par des hommes munis de cagoules et de masques, qu’elle identifie comme étant Matzneff (mis en cause dans d’autres affaires), Claude Imbert, l’ancien directeur de la rédaction du Point, Jean-François Revel, l’ancien directeur de L’Express, eux-mêmes plus ou moins entraînes par l’avocat François Gibault, biographe et cohéritier de Céline. Ces personnalités-là, on les croyait « normales » jusqu’à ces « révélations »…qui n’en sont peut-être pas.
Imbert et Revel ne sont plus là pour se défendre, et Gibault jure « n’avoir jamais assisté au moindre acte criminel ». Il « n’aurait pas manqué, si cela avait été le cas, d’y mettre un terme et de les dénoncer immédiatement aux autorités ».
On sait bien que la nature humaine peut parfois se révéler décevante voire ignoble ou monstrueuses, mais en l’occurrence ces « révélations » de Libération semblent bien peu étayées.
Marc Laudelout, qui connaît bien Me François Gibault souligne les incohérences de ces accusations dans le numéro d’été du Bulletin célinien. Ainsi la seul plaignante de cette étrange affaire décrit par exemple Me Gibault comme « petit et chétif », ce qu’il n’est certes pas. Par ailleurs, cette personne qui se plaint des agissements de l’avocat quand elle était jeune (alors que l’avocat passe pour homosexuel), demandait, dix ans plus tard, à faire un stage dans son cabinet. Elle n’était apparemment pas rancunière ! Cerise sur le gâteau (si l’on peut dire) : le psychologue qui a entendu la plaignante et qui a rédigé un rapport allant dans son sens… est le même « expert » que celui de l’affaire d’Outreau, avec sa kyrielle d’innocents condamnés, sur la base de ses rapports. Le garde des Sceaux de l’époque, rappelle Marc Laudelout, avait vainement demandé sa radiation de la liste des experts de justice agréés.
Le précédent Dominique Baudis
L’information de Libération a néanmoins été abondamment relayée. Mais il faut remarquer que Le Figaro a été beaucoup plus prudent concernant ces allégations, et Le Monde aussi. Pourtant Le Monde, à l’époque d’Edwy Plenel n’avait pas été le dernier média à participer à la curée générale contre Dominique Baudis, maire droitiste de Toulouse accusé d’avoir assassiné une prostituée au cours d’orgies. Tout était inventé. Fort heureusement pour lui, Baudis avait pu le prouver. Pour Revel et Imbert, décédés respectivement depuis de nombreuses années, reconstituer leur emploi du temps à tel jour et telle heure dans les années 1970 ou 1980 est beaucoup plus compliqué et même probablement impossible. Et comme chat échaudé craint l’eau, l’actuelle réserve du quotidien « de qualité » de la gauche semble laisser penser que les « révélations » de Libération reposent sur des allégations plus que douteuses, à ce stade de l’enquête.
Agathon
Le Bulletin célinien n° 475, juillet-août 2024 BP 42004 59011 Lille cedex
Très bien de rappeler l’affaire Baudis. A noter aussi que Claude Imbert mais surtout jean François Revel furent des anticommunistes de combat à une époque où ces derniers étaient vilipendés. Revel fut l’un de ceux des plus courageux pour démontrer que Georges Marchais était allé travailler volontairement chez Messerschmidt à Ausbourg en Bavière dès décembre 1942 et qu’il y restera jusqu’en 1944. L’express dirigé alors par Revel publia de nombreux documents qui firent litière de tous les mensonges du PCF.
En fait, ce n’est nullement Jean-François Revel qui révéla le scandale Marchais, travailleur volontaire en Allemagne chez Messerschmitt (après avoir donné toute satisfaction à l’usine AGO de Bièvres qui réparait les avions de la Luftwaffe), mais l’ancien résistant et député communiste Auguste Lecœur, présenté un temps comme dauphin de Maurice Thorez avant d’être exclu du PCF pour déviationnisme. Très hostile à Marchais, Lecœur avait reproduit en 1973 dans son journal La Nation socialiste des documents accablants sur celui qui venait d’être élu secrétaire général du PC. Marchais porta immédiatement plainte contre son accusateur mais aussi contre l’historien Pierre-Dominique Lucchini, alias Pierre Dominique, directeur de Rivarol, et Jean Boizeau, directeur de Minute, qui avaient reproduit les documents publiés par le dissident. Après des années de procédure, pendant lesquelles Le Monde prit violemment le parti de Marchais, ce dernier fut débouté de ses plaintes en première instance puis, en 1978, par la cour d’appel de Paris.
C’est seulement en 1980, après la découverte par des journalistes de L’Express de nouveaux documents à Augsbourg, que Revel s’engagea dans la bataille. Ayant suivi l’affaire dès 1973, comme rédacteur en chef adjoint de Rivarol (dont j’assurerai à mon tour la direction, de 1983 à 2010), je me devais de faire cette rectification pour rendre justice à chacun.
Madame Galic vous avez entièrement raison d’ailleurs dans mon dernier livre la désinformation autour du Parti communiste français j’ai tout un chapitre sur cette question et je fais référence à la Nation socialiste et à Minute aussi comme Rivarol. Mais en réalité celui qui porta le premier l’estocade fut Charles Tillon ancien très haut dirigeant du pcf stalinien assumé jusqu’à sa destitution en 1952 et qui dans l’émission Panorama en 1970 à la télévision indiquera que Georges Marchais était allé travailler volontairement en Allemagne. A cette époque Marchais était devenu le SG adjoint du pcf.