Quelle bonne idée que celle de partir d’une chanson traditionnelle du XVIIIe – œuvre de Rameau – connue par les enfants dans le monde entier, pour expliquer de la façon la plus vivante qui soit le rôle des cloches dans notre vie spirituelle, quotidienne !
Frère Jacques, le sonneur du couvent, est lassé de sa tâche et n’en voit plus l’intérêt – cela ne nous arrive-t-il pas à tous, d’être fatigué de ce qui nous est cependant si nécessaire ? Mais lorsqu’un jour, les cloches ne font plus entendre leur son, frère Jacques et tous les moines de son abbaye restent perplexes, et perdus. Frère Jacques part alors à la recherche de l’explication de ce phénomène, décidé à aller jusqu’à Rome et même, s’il le faut, jusqu’à Jérusalem pour retrouver l’accompagnement de ces voix amies qui manquent tant désormais, car le silence est général : plus de cloches dans le pays pour célébrer le baptême d’un enfant, plus de cloches pour dire la joie d’un mariage, le deuil de la mise en terre d’un être aimé, pour accompagner le départ des soldats se préparant à défendre leur patrie… C’est son ange gardien – les cloches invoquent tout particulièrement les anges et les saints – qui rappellera à frère Jacques l’indispensable rôle des cloches, qui rassemblent les fidèles et rappellent à tous de tourner leur âme vers le Ciel, sans oublier qu’elles savent aussi chasser le démon. Et les cloches de Noël, celles de Pâques, celles de l’Angelus ! qui, à chaque fois, représentent un véritable catéchisme en musique. Frère Jacques reprend alors sa mission avec plus d’enthousiasme que jamais.
Ce joli petit livre, dont les illustrations complètent fort bien le texte très riche, apprend aux enfants, à sa manière, ce qu’enseigne tout prêtre de l’Église catholique lors de cette magnifique cérémonie que constitue la bénédiction des cloches. Citons Mgr Fellay le jour de la bénédiction des cloches de l’école de la Martinerie, dans le Berry, rappelant que, chaque fois que tinte une cloche bénie, le son qu’elle fait entendre porte une grâce destinée à toute âme qui le perçoit ; il s’agit d’un sacramental, c’est-à-dire que plus l’on désire ces grâces, mieux on les reçoit : leur efficacité dépend de la personne qui les accueille (Présent du 27 juin 2015). Ou encore Mgr Centène, évêque de Vannes, déclarant, toujours au quotidien Présent, lors de la bénédiction des nouvelles cloches de la paroisse de Damgan, en mai 2018 : « Bénir des cloches est toujours très émouvant, […] c’est un acte qui est appelé à porter des fruits sur la durée. […] Les cloches sont l’âme d’une paroisse, […] la voix de l’identité de notre pays » (Présent 5 mai 2018).
Le jeune lecteur se remémorera tout cela quand il entendra la musique de Frère Jacques, ou quand le son des cloches lui apportera la grâce souhaitée.
Anne Le Pape
- Les cloches de frère Jacques, Martine Bazin, Petit Page, éd. du Triomphe, 32 pages, 17,90 euros.