Le 12 décembre, l’Eglise catholique fête Notre-Dame de Guadalupe, une des apparitions les plus attachantes de la Vierge Marie qui eut lieu il y a près de cinq siècles, en 1531, au Mexique. Un film qui sera le 4 décembre sur les écrans retrace avec bonheur son histoire.
Guadalupe, Mère de l’humanité, comporte deux genres entremêlés : la reconstitution fictive des faits, le voyant, Juan Diego, rencontrant la Vierge qui lui demande de bien vouloir être son messager près de l’évêque pour qu’il construise une église où elle attirera les fidèles en l’honneur de son Fils ; et une partie de rencontres avec des responsables religieux, notamment de la basilique construite sur les lieux de l’apparition, ainsi qu’avec des chercheurs et des scientifiques, qui éclairent le contexte du Mexique en ce début du XVIe siècle de façon passionnante, puis des témoignages de guérison – parfois un peu longs car détaillés, mais montrant combien la dévotion à Notre-Dame de Guadalupe dépasse largement le cadre du Mexique pour être pratiquée dans le monde entier.
Le récit de l’apparition est mené avec finesse et, bien sûr, une grande fidélité aux mots même de Juan Diego rapportés par l’un de ses amis indigènes dans un texte écrit à l’époque. On est bouleversé par la courtoisie et la délicatesse de la Vierge envers cet humble paysan, qui rappelle les paroles de notre Mère du Ciel à Bernadette « Me feriez-vous la grâce… ? ». A Juan Diego, qu’elle appelle, dans sa langue bien sûr, « mon tout-petit », elle assure : « Je t’en serai infiniment reconnaissante ». Juan Diego l’appelle en retour « Petite mère », avec une affection et un respect infinis. L’humble Juan Diego fut canonisé en 2002 par Jean-Paul II lui-même qui, bien que très affaibli à l’époque, a tenu à se rendre à cette occasion au Mexique.
Des historiens resituent avec précision et justesse le rôle de l’apparition, qui a suivi de près l’arrivée sur le nouveau continent des Espagnols. Cortes débarqua en 1519 avec une poignée de soldats, environ 600, les mêmes que ceux qui venaient de mener à bien la Reconquista face aux musulmans, en Espagne. Poussés par Isabelle la Catholique, leur but premier était bien l’évangélisation de ces peuples à la civilisation très avancée, certes, mais où les sacrifices humains avaient lieu en masse pour se concilier les forces de la nature : 20 000 personnes, chaque année, étaient ainsi tuées puis éventrées… D’une part Cortes sut se concilier des groupes hostiles au gouvernement mexicain d’alors, d’autre part les indigènes, voyant que leurs idoles ne leur venaient pas en aide, perdirent foi en elles. Mais l’enthousiasme retomba rapidement et l’apparition de la Vierge vint à point pour montrer la puissance spirituelle de la religion catholique. Elle entraîna la conversion de neuf millions d’indigènes.
La tilma de Juan Diego – sorte de pèlerine – constitue la preuve demandée par l’évêque pour croire à l’apparition. L’image de la Vierge s’est miraculeusement imprimée sur le tissu. Relique miraculeuse vénérée à Guadalupe, elle reste fascinante par son côté inexplicable scientifiquement : aucune trace de peinture ; image portée sur un tissu dont normalement les fibres se détériorent très vite (or elle est intacte près de cinq siècles plus tard) ; étoiles du manteau de la Vierge représentant les 12 constellations principales et la planète Jupiter qui se trouvaient dans le ciel au moment même de l’imprégnation du dessin, le matin du 12 décembre 1531 ; plusieurs personnages dont l’image est présente dans les yeux de la Vierge ; sans oublier les battements de cœur du bébé – la Vierge est enceinte – entendus par un gynécologue qui a eu l’idée de poser son stéthoscope sur le ventre de la Vierge… En 1921, au moment de la persécution folle contre l’Eglise catholique au Mexique, une bombe fut déposée au pied de la tilma et détruisit une partie de la basilique… mais ne la toucha pas.
La partie documentaire montre la grande dévotion à Notre-Dame de Guadalupe au Mexique, plus forte que jamais : entre les 10 et 12 décembre, 10 millions de personnes viennent chaque année la célébrer – à leur manière, un peu différente de notre manière européenne, incluant musique et danses. Guadalupe, Mère de l’humanité est l’histoire non seulement de l’apparition, mais aussi de ses côtés miraculeux et de sa portéesur un grand nombre de catholiques, sensibles à l’attitude compatissante de la Bienheureuse Vierge Marie.
Anne Le Pape