Entretien avec Ghislain Dubois, auteur du livre Né français mort croate. Jean-Michel Nicolier, un Français à Vukovar aux éditions Dualpha, collection «Vérités pour l’Histoire »
(propos recueillis par Fabrice Dutilleul).
« Jean-Michel et ses 264 compagnons d’infortunes
sont battus avant d’être purement et simplement assassinés.
La plupart au bord d’une fosse commune creusée par les Serbes… »
Pourquoi un livre sur la Croatie et Jean-Michel Nicolier ?
Je suis avocat depuis 35 ans au Barreau de Liège en Belgique et suis également un homme de cœur et de convictions.
Après avoir aidé les Chrétiens du Liban entre 1985 et 2025, en me rendant à 15 reprises sur place et organisant un pèlerinage à Lourdes de 25 jeunes handicapés de guerre en septembre 1997, puis en 2010 le parrainage par 150 familles belges d’autant d’enfants orphelins de toutes confessions, les souffrances de la Croatie et sa guerre d’indépendance imposée par la Serbie communiste me conduisirent à organiser, entre octobre et décembre 1992, l’envoi de 7 camions de 22 tonnes chacun, de vivres, médicaments et vêtements, à destination de l’association Caritas à Zagreb, et à Dubrovnik assiégée.
En décembre 1991, je me suis rendu sur place et singulièrement sur la ligne de front afin de porter témoignage.
Quand j’ai appris, bien plus tard, le parcours de ce jeune français de Vesoul, Jean-Michel Nicolier, alors âgé, comme moi, de 25 ans, qui a voulu témoigner jusqu’au martyre de sa solidarité avec le peuple croate, j’ai voulu lui consacrer un livre.
Entre-temps, sa maman Lyliane et son frère Paul me demandèrent de les assister, comme avocat, dans leur quête pour retrouver le corps de Jean-Michel. Ce que j’ai accepté immédiatement. La boucle étant, en quelque sorte, bouclée.
Parlez-nous de Jean-Michel Nicolier…
Au printemps 1991, Jean-Michel a décidé de rejoindre les Croates dans leur guerre d’indépendance, touché par les souffrances qu’ils enduraient. Il n’était ni un militant ni un idéologue, mais seulement un jeune homme de cœur, un idéaliste. Il est arrivé seul et sans connaître qui que ce soit, à la gare de Zagreb, et s’est engagé dans la résistance. Il défendra Karlovac, puis Vukovar.
Blessé au cours des combats de Vukovar, en novembre 1991, il est hospitalisé à l’hôpital de la ville quand celle-ci tombe le 18 novembre 1991 après un long siège et de multiples victimes. Le 19, les milices serbes prennent possession de l’hôpital et le 20 évacuent par bus tous les hommes. Ceux-ci finissent leur sinistre voyage dans le hangar d’une ferme à Ovcara, à 4 kilomètres au sud-ouest de Vukovar.
Là, Jean-Michel et ses 264 compagnons d’infortunes sont battus avant d’être purement et simplement assassinés. La plupart au bord d’une fosse commune creusée par les Serbes, et quelques autres, comme Jean-Michel, abattus d’une balle dans la tête à la sortie du hangar. Son corps n’a, à ce jour, pas encore été retrouvé.
Quel est votre rôle d’avocat ?
Lyliane et Paul ont saisi la justice en vue de voir les coupables recherchés et condamnés, et surtout en vue de retrouver le corps de Jean-Michel, pour lui donner une digne sépulture. Sa maman espère pouvoir être enterrée à ses côtés sur cette terre de Croatie qu’il a tant aimée. Mon rôle est de les assister et de les aider dans ce combat autant humain que judiciaire.
Mon livre est une manière de les aider car il s’agit, notamment, de faire pression sur le gouvernement serbe actuel pour qu’il mette tout en œuvre pour livrer les coupables à la justice française et le corps de Jean-Michel, à sa famille.
Ghislain Dubois, auteur du Né français mort croate. Jean-Michel Nicolier, un Français à Vukovar aux éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire », 180 pages, 25 €. Pour commander ce livre, cliquez ici
