Netanyahu

La France, bouc émissaire de Netanyahou

Cerné par la justice israélienne pour sa propension à s’enrichir démesurément aux dépens de l’État, très critiqué par ses propres compatriotes, surtout depuis la récente levée — alors que les juifs religieux, dont les représentants sont nombreux au sein de son gouvernement, sont toujours exemptés du service militaire — de 60 000 réservistes nécessaires à la prise de contrôle totale de la bande de Gaza que l’ONU vient de déclarer officiellement en « état de famine », Benyamin Netanyahou perd ses nerfs.

Un cercueil pour Macron, qui “alimenter le feu antisémite”

Et cherche donc, très bibliquement (Lévitique, 16-21), un bouc émissaire. Trouvé en la personne d’Emmanuel Macron, attaqué par lui le 19 août dans un courrier où l’Israélien accuse le Français « d’alimenter le feu antisémite en France en appelant à la reconnaissance internationale de l’État de Palestine » et se dit « très préoccupé par la montée alarmante de l’antisémitisme en France et par le manque d’actions décisives de votre gouvernement pour y faire face ». « Ces dernières années, l’antisémitisme a ravagé les villes françaises », écrit encore Benyamin Netanyahou qui, ignorant délibérément le massacre de la promenade des Anglais à Nice ou les assassinats de cinq prêtres français par des musulmans immigrés, soutient que « l’antisémitisme a encore augmenté » depuis que l’Élyséen a annoncé fin juillet que la France reconnaîtrait le mois prochain, lors de l’Assemblée générale de l’ONU, l’État de Palestine.

Reconnaissance du reste de pure forme puisque, depuis 1967, l’Israël s’acharne à dépecer cet État et à le rendre non viable, avec la captation des eaux du Jourdain et du Golan puis la colonisation systématique d’une partie de la Cisjordanie, séparée de Gaza (1).

S’insurgeant contre cette « analyse erronée, abjecte et [qui]ne demeurera pas sans réponse » (laquelle ?), l’interpellé a répliqué que « la période exige gravité et responsabilité, pas amalgames et manipulations », et précisé que« la République protège et protégera toujours ses compatriotes de confession juive », y compris ceux qui ne lui en montrent aucune gratitude.

Ainsi le rabbin David Daniel Cohen qui dans une vidéo mise en ligne le 3 août surla chaîne Archives 260 — pourtant honorablement connue car consacrée en principe à l’histoire juive et à la géographie biblique —, avait comparé Macron à Titus, l’empereur romain responsable de la destruction du second temple de Jérusalem, et déclaré tout net : « Ce monsieur qui dirige la France a exprimé son antisémitisme profond. Ce président français, il faut qu’il le sache : il a tout intérêt à préparer son cercueil»

Une menace de mort de nature à pousser à l’action quelques zélotes de la LDJ et qui, proférée par un mollah iranien, aurait provoqué un scandale international, mais que Joshua Zarka, ambassadeur de l’Israël, n’a pas condamnée et qu’a vite éclipsée l’abattage, déploré par la classe politique et la presse unanimes, de l’olivier planté à la mémoire du jeune juif Ilan Halimi, victime du gang (africain) des Barbares (2). Le pire châtiment étant promis aux profanateurs.

Étudiante gazaouie : scandale ou piège ?

Largement discrédité dans son pays ainsi qu’aux Etats-Unis où, constatant qu’à cause de son maximalisme vis-à-vis des Palestiniens, « le peuple juif est confronté à une grave crise morale, menaçant le fondement même du judaïsme », près de mille rabbins ont signé une pétition pour demander l’arrêt de l’offensive contre Gaza, Netanyahou compte en effet sur la diaspora pour reforer son blason — et surtout rester en place — en la prenant à témoin des méfaits réels ou supposés de l’État français.

On se souvient de l’incident, grossi en scandale, de l’étudiante gazaouie arrivée en juillet en France pour intégrer Sciences Po Lille en septembre mais expulsée vers l’Irak dès le 3 août après la révélation qu’elle avait auparavant posté des « contenus haineux » à l’égard des juifs et même un hommage à certain défunt chancelier. L’affaire avait ridiculisé la France d’autant que, affolés, nos ministres des Affaires étrangères, de l’Intérieur et de l’Éducation nationale s’accusaient mutuellement de négligence. Sciences Po expliquait avoir « accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem », le Quai d’Orsay répliquant que le cas avait été examiné par les services israéliens qui avaient donné leur accord, accordé un visa à la jeune femme, ainsi qu’un siège sur un vol d’El Al. Mais n’était-ce pas à seule fin de faire fuiter ensuite son sulfureux passé pour dissuader toute velléité d’accueil de réfugiés palestiniens et surtout embarrasser un Macron que Gideon Moshe Sa’ar, ministre israélien des Affaires étrangères, a carrément accusé de lancer une « croisade contre l’État juif » ?

Quand le Mossad kollaborait

Reste que la « terre de lait et de miel » sait quant à elle fort bien composer avec l’antisémitisme quand ça l’arrange.

Après l’arrivée au pouvoir au Caire du colonel Gamal Abdel Nasser, le Mossad israélien voulait à tout prix neutraliser une équipe de savants est-allemands réunis par l’Égypte qui ambitionnait de se doter de fusées à tête nucléaire. Son directeur Isser Harel recourut donc en 1962 aux bons offices d’une grande figure du IIIème Reich : Otto Skorzeny, ancien commandant dans la 1ère division SS Leibstandarte Adolf Hitler, puis de la nouvelle unité SS d’élite Friedenthal avant d’être chargé par le Führer en personne de retrouver Benito Mussolini alors emprisonné en Italie au Grand Sasso et de le libérer, ce qu’il fit dans des conditions épiques. De même Skorzeny s’acquitta-t-il de sa mission pour la plus grande satisfaction du Mossad puisque l’opération Damoclès mise au point en 1963 par « l’homme le plus dangereux du monde » (cf. François Brigneau dans son livre Quand les armes se sont tues, éd. F.B. 1990) fut une réussite. Certains savants ayant été tués, les autres préférèrent fuir l’Égypte, qui dut renoncer à son projet.

Le chevalier de la Croix de fer avec feuilles de chêne avait-il agi pour faire radier son nom de la liste des « criminels nazis » à abattre établis par le Comité Wiesenthal ou, Nasser passant alors pour une créature du Kremlin, par la haine du communisme qui l’anima de son extrême jeunesse à ses derniers instants puisque, peu avant sa mort (d’un cancer) en 1975, il essayait de monter en Espagne un mouvement antimarxiste ? Reste que l’État hébreu ne put que se féliciter de l’action de l’ancien officier SS, largement documentée par la presse israélienne. Laquelle n’a jamais élevé d’objections morales à une telle collaboration.

Camille Galic

  1. https://nouveaupresent.fr/2025/07/25/reconnaitre-letat-palestinien-mais-quel-etat-et-dans-quel-etat/
  2. https://nouveaupresent.fr/2025/08/20/dun-arbre-et-des-eglises/
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