Menace sur les lieux saints français de Jérusalem

S’exprimant le 26 novembre lors de l’assemblée générale de l’ONU dans un hémicycle déserté, Benyamin Netanyahou s’est montré particulièrement agressif contre la France, le Royaume-Uni, le Canada et l’Australie qui venaient de reconnaître officiellement un État palestinien. « Israël ne vous permettra pas de nous imposer un État terroriste. Nous ne commettrons pas un suicide national parce que vous n’avez pas le courage de faire face à des médias hostiles et à des foules antisémites qui réclament le sang d’Israël », a-t-il asséné.

Par quels moyens ripostera-t-il ? D’abord par le soft power, car les médias des pays visés sont loin d’être tous hostiles à l’État hébreu. Ensuite par « des représailles », avait estimé quelques jours plus tôt sur France Info Gérard Araud, ancien ambassadeur de France en Israël puis aux États-Unis. Par exemple la fermeture du consulat général de France à Jérusalem, le refus de recevoir les ambassadeurs de France et des autres nations ostracisées ou d’accorder un visa à leurs diplomates.

« La Palestine nous appartient »

Mais d’autres représailles sont possibles dans notre cas. Par exemple l’annexion des quatre lieux saints hiérosolymitains que nous nous offrit en 1856 le sultan ottoman Abdulmecid 1er en remerciement de l’intervention française lors de la guerre de Crimée: l’église du Pater Noster (ou « l’Eleona ») sur le mont des Oliviers à Jérusalem-Est, le monastère d’Abou Gosh, à Jérusalem-Ouest, le Tombeau des Rois (en référence aux rois de Judée) et surtout la basilique Sainte-Anne (Jérusalem-Est), érigée par les Croisés en 1140 là même où les parents de la vierge Marie auraient trouvé refuge (1)… et où deux de nos présidents, Jacques Chirac en 1996 puis Emmanuel Macron en 2020, eurent toutes les peines à pénétrer et à en faire sortir les soldats israéliens occupant la basilique. Bien que l’appartenance de ces lieux à la France ait été confirmée jusqu’en 1948 par les autorités britanniques exerçant la tutelle sur la Palestine, puis par l’État d’Israël en mai 1949 et enfin par l’Autorité palestinienne en 1997. Il est vrai que, comme l’a prétendu tout récemment Netanyahou, « la Palestine nous appartient » et qu’il peut donc y faire ce qu’il lui plaît. Comme l’a encore dit Gerard Araud, «les États-Unis sont les seuls qui peuvent exercer une influence sur Israël car Israël manifeste la plus grande indifférence au reste du monde ».

Mais « la plus grande indifférence » ne prévaut-elle pas aussi en France même de la part des pouvoirs publics quand des sanctuaires chrétiens sont attaqués ?

Encore une église vandalisée

Le 17 septembre, alors que les nordistes préparait là la procession de Notre-Dame de Hon, l’église Saint-Martin de Hon-Hergies a été retrouvée vandalisée : porte de la sacristie fracturée, tabernacle ouvert et disparition de plusieurs vases liturgiques. Si, pour le maire Luc Bertaux, qui a déposé plainte au nom de la commune, « l’église Saint-Martin n’est pas seulement un édifice religieux, elle est aussi un lieu de mémoire, un lieu d’histoire, un lieu de rassemblement et de partage, un lieu de vie. Il s’agit de la maison de tous », le ministre de l’Intérieur et donc chargé des Cultes Bruno Retailleau n’a pas réagi. Comme il l’avait fait, et avec quelle indignation, quand des svastikas avaient été découverts sur les murs d’une synagogue ou des têtes de porc sur le porche de quelques mosquées.

On peut donc redouter qu’en cas d’annexion par l’Israël des Lieux saints, le pouvoir-qui-ne-recule-pas mette cette humiliation dans sa poche avec son pouvoir dessus. A sa décharge, on admettra que l’Élysée comme Matignon ont actuellement d’autres chats à fouetter, la formation d’un gouvernement se révélant presque aussi difficile que la résolution du problème palestinien.

Claude Lorne

1. Voir le beau livre d’Anne Brassié, Sainte Anne de Jérusalem à Auray, éd. du Rocher 2002.

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