Le premier numéro du Journal du Dimanche d’après-grève est dans les kiosques depuis dimanche. Cette parution imprévue est un magnifique pied-de-nez à ceux qui expliquaient doctement que, sans eux (la rédaction en grève), le journal ne pourrait jamais paraître.
Le JDD dé-wokisé a choisi de faire sa « une » sur les innombrables « faits divers » criminels qui ponctuent l’actualité, ces dernières années, et dont les coupables font l’objet de condamnations visiblement insuffisantes, puisque ces assassins sont le plus souvent des multirécidivistes. On apprend au passage qu’en France les coups et blessures volontaires ont augmenté de 46% en 14 ans. C’est le fameux « sentiment d’insécurité » fustigé par la gauche et par Dupont-Moretti. Seule la peine de mort réglerait cette question, mais vous l’avez compris, la suppression de la peine de mort, comme l’avortement des enfants à naître et le mariage homo sont des « acquis » irréversibles.
Le journal publie en page 2 une lettre ouverte signée par des dizaines de personnes qui ont perdu récemment un proche dans des circonstances de ce genre. Ces affaires avaient été médiatisées en leur temps, mais elles étaient effacées de notre mémoire. Les trouver réévoquées ici, ensemble, est impressionnant. Ce qui est nouveau, c’est que l’on nous apprend ce que sont devenus les assassins, les bourreaux, les tortionnaires. Charlotte d’Ornellas en fait la recension et, surprise, beaucoup sont déjà libérés. Certains vivent d’ailleurs à côté des familles de victimes, certes avec un anneau à la cheville, mais en fin de compte ce sont les familles de victimes qui déménagent, pour ne plus avoir à croiser au supermarché l’assassin de leur fils ou de leur fille.
Nous évoquions Charlotte d’Ornellas, ancienne journaliste à Présent, comme le ressassent les médias mainstream – pour tenter de la discréditer alors que c’est au contraire un gage de qualité -, mais il convient de remarquer qu’à part elle, et à part les éditoriaux et billets d’humeur de Pascal Praud et de Mathieu Bock-Côté, il n’y a guère de signatures connues, et sans doute pas mal de pseudonymes.
Assez décevant, voire contre-productif
Le reste ressemble assez au JDD habituel : les mots croisés, une double page sur le rosé de Provence, le sport, les factures d’énergie des boulangers, les tortues ninja à la rubrique cinéma… Rien de ce qui ressemblerait de près ou de loin au nazisme, au fascisme, voire même à la simple « extrême droite » tant annoncée, et qui nous a fait nous précipiter au kiosque.
D’ailleurs côté pseudo « extrême droite », c’est même assez décevant, pour ne pas dire contre-productif : la rubrique des livres nous offre des critiques (non signées) qui auraient aussi bien leur place à Libération ou mieux à L’Huma. A propos d’un livre (roman ou autobiographie, on ne sait pas trop), on peut lire cette phrase : « souffle enfin le vent prometteur du Front populaire ». Prometteur ? La grève générale ? le sabotage communiste dans nos industries d’armement (certes à partir du pacte Ribbentrop-Staline seulement) ? La démoralisation générale ? Et pour finir, une guerre mondiale ? Merci le Front populaire !
A propos d’une réédition d’un livre d’Eugène Dabit (Zone verte), le critique écrit que Dabit fut « emporté par la scarlatine à Sébastopol ». Ça, c’était la thèse stalinienne. Le communiste Maurice Lime (du moins communiste à l’époque), était certain qu’il avait été assassiné sur ordre de Staline, comme d’autres intellectuels de l’ouest, « déçus » par leur découverte de ce qu’était vraiment le communisme réalisé. Aragon, qui n’a jamais renié le communisme, n’a jamais cru pour autant à la thèse soviétique d’une scarlatine bienvenue. Quant Béraud était revenu de son reportage en URSS, il a craint, jusqu’au passage de la frontière, sa propre liquidation, ses articles – peu flatteurs – ayant commencé à être publiés en France.
Ainsi, dans cette page « littéraire », le JDD dégauchisé l’est si peu qu’il nous réinvente un Front populaire de rêve et qu’il entérine la thèse stalinienne d’une mort naturelle d’Eugène Dabit. Six semaines de résistance à la grève macrono-gauchiste pour en arriver là ? C’est un peu décevant !
François Solchaga
Je constate depuis des décennies, pour m’en affliger et en ressentir une grande colère, que les organes classés à droite tels Le Figaro, Le Point, etc., avaient des rubriques culturelles qu’on croirait sorties de Libé et de Télérama, souvent en parfaite contradiction avec les éditos, comme si on en abandonnait la rédaction à des gauchistes pour avoir la paix rédactionnelle, ou qu’on voulait paraître « tendance ». Dans les deux cas, c’est de la lâcheté et un grand mépris des lecteurs.
Apparemment, le JDD nouveau souffre de la même tare. J’espère comme François Solchaga qu’elle sera vite corrigée.