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Amin Maalouf, une réussite libanaise

Amin Maalouf, un écrivain Franco-libanais dont les livres ne sont plus à présenter, vient d’être élu jeudi secrétaire perpétuel de l’Académie française où il succède à Hélène Carrère d’Encausse, elle-même d’origine géorgienne. Et cela tombe au mieux puisque les thèmes de l’exil, du nomadisme, du métissage culturel, de l’identité sont récurrents dans l’œuvre de l’académicien reçu sous la Coupole des Immortels en 2011 au fauteuil de Claude Lévi-Strauss, et qui avait fait graver sur son épée une Marianne et un Cèdre du Liban.

Le romancier libanais aurait pu choisir un Louis IX, Saint Roi amoureux de l’Orient et du Liban, en lieu et place de l’abominable Marianne, caricature sanglante née des œuvres du siècle des Lumières dont il se réclame, ou même un Napoléon III à qui l’histoire n’a pas rendu justice pour l’intelligence pointue qu’il avait de l’Orient et du Levant en particulier. « Citoyen du monde », il se garde bien de témoigner du martyre du Liban qu’il a quitté en 1976 et est apparu au sein du cénacle des écrivains respectés et potentiels candidats aux divers prix de ce monde des lettres si fermé avec un « coup brillant », publiant en 1983 « Les croisades vues par les arabes .» En pleine guerre du Liban, en plein Jihad anti-chrétien, cette démonstration « d’ouverture d’esprit et de tolérance » est un coup de maitre qui lui ouvre toutes les portes. Il enchaine avec ce qu’il fait le mieux, les romans historiques dont le merveilleux « Rocher de Tanios » décroche un prix Goncourt en 1993. Ce brillant conteur enchaine avec « Léon l’Africain » (1986), « Samarcande » (1988), « Le Périple de Baldassare » (2000). Mais il faut revenir à des thèmes socialement « corrects » avec notamment « Les Identités meurtrières » (1998) qui cloue très habilement au pilori le besoin d’appartenance collective culturelle, religieuse et nationale. « Pourquoi ce désir, en soi légitime, conduit-il si souvent à la peur de l’autre et à sa négation ? » Le décor est planté. Dans « Origines» (2004), il raconte l’épopée des Maalouf du XIXème siècle, entre exil à Cuba et cohabitation forcée avec les Ottomans au Liban. Il y écrit combien, dans son monde, « on naît naturellement nomade, cosmopolite, polyglotte.

Et c’est la famille, le lignage sacré, qui fonde l’identité diasporique des êtres qui, comme lui, vont, depuis le Liban, essaimer de par le monde. » Un hymne, remarquablement conté, au citoyen du monde idéalisé par une lignée de gens cultivés, raffinés, « humanistes », un hymne qui parvient presque à faire oublier qu’aujourd’hui, ce même citoyen du monde est un être détaché de toute patrie charnelle, viscéralement relativiste concernant les questions spirituelles et sociétales et nécessairement matérialiste du fait de sa condition de « nomade » qui implique dans son cas l’assurance d’un bien être financier certain très éloigné du nomadisme tribal des sociétés primitives.

Dans « Les Désorientés » (2012), il évoque son cher Liban avec nostalgie, un « Levant» idéalisé, où selon ses souvenirs d’avant-guerre, « il y avait une qualité de coexistence entre des communautés différentes qui a disparu et n’aurait jamais dû disparaître car cela aurait dû être la préfiguration de l’avenir et aujourd’hui cela appartient au passé ». Or, il semble oublier -volontairement, car on ne saurait questionner ses qualités d’historien- que la coexistence islamo-chrétienne du Levant multiculturel et confessionnel est basé depuis des siècles sur un savant rapport de force jalonné de massacres et de tentatives de domination de part et d’autre, avec ici et là des âges d’or, trop brefs pour perdurer et trop longs, heureusement, pour être oubliés !

Sophie Akl-Chedid

Un commentaire

  1. Traître à son pays, parler la langue française lui donne t il le droit de parler au nom de la France ? A moins que la France soit devenue un Liban bis…

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