Le Patriarche maronite n’a pas mâché ses mots lors de sa dernière homélie dominicale, au lendemain de la visite de Gebran Bassil au siège Patriarcal de Bkerké, visite durant laquelle Mgr Béchara Raï s’est formellement opposé au départ du General Joseph Aoun de la tête de l’armée, assurant que la prolongation de son mandat était nécessaire afin de « préserver la stabilité au Liban ».
« Il est honteux d’entendre des propos qui évoquent le fait de faire tomber le commandant en chef de l’armée durant la période la plus critique de l’histoire du Liban » a-t-il martelé en apportant son soutien à l’initiative des Forces Libanaises qui viennent de présenter un projet de loi visant à prolonger d’un an le mandat du chef de l’armée pour « circonstances exceptionnelles ». Tout est dit. L’insatiable député Gebran Bassil, ex ministre des télécommunications, de l’énergie et de l’eau, des affaires étrangères, patron du Courant Patriotique Libre et surtout gendre du général Michel Aoun démontre une fois encore que l’ennemi de l’intérieur est plus dangereux que celui de l’extérieur. Depuis la fin du mandat de son beau-père en octobre 2022, M. Bassil, à défaut de pouvoir se faire élire lui-même, tente par tous les moyens de s’imposer comme un faiseur de Président afin de préserver son influence au cœur de ce qui reste des Institutions de l’Etat. Pour ce faire, il doit écarter à tout prix tout candidat crédible, quand bien même ses manœuvres menacerait la dernière institution encore garante de la survie du Liban, l’armée libanaise déjà privée d’un Chef d’Etat-major depuis le départ à la retraite de ce dernier en 2022 et dont le général en chef, Joseph Aoun, devrait également prendre sa retraite en janvier 2024. Or, la nomination d’un chef de l’armée revient exclusivement au Président de la République et en l’absence de tout consensus pour mener à bien l’élection de ce dernier, refuser la prolongation du mandat de Joseph Aoun et comploter pour faire nommer par un conseil des ministres en charge des affaires courantes soumis au Hezbollah un « Conseil Militaire » (organe décisionnel de l’armée) revient à livrer les Forces armées libanaises à la division et le pays au chaos, la motivation principale de M. Bassil étant de réduire les chances de l’actuel patron de l’armée d’accéder à la présidence de la République, au moment où son nom est de plus en plus évoqué comme étant le seul capable de maintenir la cohésion du pays et de l’institution militaire devant les menaces de guerre, de destruction et de coup d’Etat.
Sacrifiant tout honneur sur l’autel de ses ambitions, ces menaces existentielles pour le Liban réduites au rang de « dommage collatéral », Gebran Bassil a donc envoyé le ministre sortant de la Défense chez le Premier ministre sortant, Najib Mikati, pour l’informer que le CPL est prêt à réintégrer le Conseil des ministres et à oublier ses « positions de principes » qui refusent que le Conseil des ministres prenne des décisions en l’absence d’un président, notamment la nomination d’un Conseil militaire et d’un nouveau commandant en chef. M. Mikati a alors demandé si cette position relève d’un consensus chrétien concernant la personne du commandant en chef de l’armée et l’ensemble du Conseil militaire. Selon le quotidien Nidaa el Watan, la réponse était que la couverture du CPL était suffisante, étant appuyée par le tandem chiite Hezbollah/Amal.
Ainsi, non content d’avoir largement contribué à la ruine du Liban, de l’avoir complètement coupé de ses alliés naturels arabes et donc de toute relation commerciale pérenne, d’avoir livré ses Institutions à une milice irano-libanaise qui a fait de la Suisse du Moyen Orient un poste avancé des Gardiens de la Révolution et une plateforme du trafic de Captagon, Bassil se propose donc de livrer à ses alliés le dernier rempart de ce qui fut la forteresse libanaise à l’heure ou la guerre est à notre porte et le Liban plus fragile que jamais.
Heureux temps ou la haute trahison recevait pour salaire un peloton d’exécution !
Sophie Akl-Chedid
Pauvre Liban, otage du Hezbollah pour l’éternité ?!