Ce qui est bien avec Livr’arbitres, c’est qu’on est certain que la revue ne quittera pas sa table de chevet pendant un mois au moins. Cette revue littéraire est tellement copieuse que vous ne pouvez épuiser en quelques heures seulement le plaisir de la lire.
Son format permet en outre de la conserver, intacte, de lui faire prendre place dans votre bibliothèque, plutôt que de la « démembrer » pour ne garder que les deux ou trois meilleurs articles, qui finiront dans des dossiers…que vous ne reconsulterez probablement jamais. Le classement d’une bibliothèque est d’ailleurs l’un des plus grands problèmes posés à notre temps, juste après l’immigration, le pouvoir d’achat, le socialisme, le wokisme et le macronisme. Les dilemmes relatifs au classement des revues sont parfois insurmontables, et l’idéal serait certainement de se procurer systématiquement deux exemplaires de chaque numéro de Livr’arbitres. Ainsi pour ce numéro d’automne, je me pose la question : dois-je le classer avec les autres numéros de cette revue, ou le ranger avec les livres de l’écrivain Jean Cau, qui est le thème central de ce numéro ? Mais il se trouve que j’ai peu de livres de Jean Cau. Il ne figurait pas dans mon panthéon personnel, et peu de gens de ma génération le connaissaient (il est mort il y a plus de 30 ans, alors que j’entrais seulement en fac de lettres). Dans ma bibliothèque je ne trouve que deux livres de Jean Cau : Le coup de barre, paru en 1950, que je possède dans une jolie reliure demi-chagrin bleu foncé, et Un testament de Staline (1967). Autant dire que je ne connais pas Jean Cau, d’autant que, pour ce qui concerne Le coup de barre, j’ai le vague souvenir de… n’avoir rien compris, à sa lecture ! Mais je suis persuadée qu’Alain de Benoist (qui a toujours dit beaucoup de bien de cet auteur), Christian Dedet, Aristide Leucate, Marc Laudelout ou encore Jérôme Besnard (tous ceux-là je les lis et les apprécie) et quelques autres vont m’aider à comprendre en quoi Jean Cau, « peintre de son époque », a su nous donner « une leçon d’indépendance ». C’est toujours agréable de découvrir, même tardivement, un bon écrivain, voire un grand écrivain qu’on ne connait que de nom ou de réputation.
« Je n’ai plus le temps de lire »
On dit aussi qu’avec le temps on lit moins. Quand j’interroge mes proches, mes amis, sur leur lecture du moment, il est vrai que j’entends souvent des réponses du genre : « Je n’ai plus le temps de lire ». Mais quelle tristesse !
Je trouverai forcément le temps de lire Jean Cau, de pignocher dans son œuvre, qui est abondante. Je suis certaine que ce dossier va m’aider dans mes choix, d’autant que les ouvrages de Jean Cau ne sont pas très difficiles à dénicher.
Faut-il commencer par son Goncourt, La pitié de Dieu ? On verra, et je vous dirai peut-être.
Le dossier Jean Cau se termine par l’évocation du portrait que celui-ci consacra à Alain Delon dans Paris Match en 1980, actualité oblige. Delon avait pour sa part préfacé un texte (posthume) de Jean Cau : Le Candidat (sur sa candidature manquée à l’Académie française).
Livr’arbitres m’est aussi très utile pour dénicher les bons auteurs d’aujourd’hui. Si c’est grâce à Valeurs actuelles que j’ai lu Richard Millet, c’est grâce à Livr’arbitres que je me suis plongé dans les romans de Patrice Jean. Ces conseils de lectures, on les trouve dans les premières pages de la revue.
Un brillant assaut des lettres françaises
Le dossier Jean Cau n’est pas le seul dossier de ce numéro. Halloween oblige, nous avons droit à un second dossier, consacré aux « monstres et vampires en littérature ». L’occasion d’en savoir plus sur les œuvres de Huysmans, Tolkien, Lovecraft, Kafka ou encore Barbey d’Aurevilly et ses Diaboliques. Et même à un troisième dossier sur « Paris en lettres capitales », raconté par « ses écrivains contemporains ». Un feu d’artifice littéraire à la gloire de notre Paris, sous la plume (notamment) d’Alain Paucard, de Michel Marmin, de Thomas Morales, de Thomas Clavel et bien d’autres très bons écrivains d’aujourd’hui.
Vous l’avez donc compris, je suis une in-con-di-tionnelle de Livr’arbitres, dont la lecture me fait dire qu’il ne faut pas trop soupirer, dans la nostalgie des revues comme La Parisienne, Matulu, Accent grave, ou même Le Figaro littéraire. Le relais est fort bien pris, aujourd’hui. Et pour le prouver, permettez-moi de citer encore pêle-mêle Xavier Eman, Thierry Marignac, Thierry Bouclier, François Kasbi, bien d’autres, chroniqueurs réguliers de Livr’arbitres, qui mènent actuellement un brillant assaut des lettres françaises, ce qui les conduira, je l’espère, à une toujours plus forte notoriété, d’ores et déjà méritée. Auprès des gros lecteurs dont je m’enorgueillis d’être, cette notoriété est déjà acquise, en toute hypothèse.
Madeleine Cruz
Livr’arbitres n°47, automne 2024, 188 p., Patrick Wagner 36 bis rue Balard 75015 Paris
Le site de la revue: www.livr-arbitres.com