Trump

Trump 2 : pile ou face pour les Européens

L’insubmersible milliardaire qui a échappé à deux tentatives d’assassinat au cours des derniers mois (peut-être trois), qui a subi une persécution judiciaire inédite, un caillassage médiatique sans précédent, a finalement réussi son incroyable pari en remportant cette présidentielle états-unienne le mardi 5 novembre 2024.

Le Congrès se réunira le 6 janvier 2025 à Washington. Ironie du sort, ce sera Kamala Harris, en tant que vice-présidente, qui présidera cette séance commune. Elle sera chargée d’annoncer officiellement le nom du vainqueur, en l’occurrence Donald Trump. L’ex 45ème président deviendra donc officiellement en janvier prochain le 47ème. Le seul ex Commander in Chief qui avait jusqu’alors réussi à être réélu après avoir quitté une première fois la Maison Blanche était Grover Cleveland. C’était en 1892. Derrière cet exploit historique, comment nous autres nationalistes français et militants de la cause européenne devons-nous appréhender cette nouvelle donne ?


Passé le bref moment de cette délicieuse schadenfreude provoquée par les cris d’orfraie des étudiants en psycho-socio, les larmes de ceux qu’on appelle par antiphrase les « vérificateurs de faits » (fact checkers), les réjouissantes mines déconfites des commentateurs de LCI-A (la branche télévisuelle hexagonale de l’État Profond états-unien) sans oublier les jérémiades puériles de la gauche occidentale dans toutes ses composantes, il n’est pas inutile de tenter d’imaginer ce que pourraient être les quatre années de Donald Trump à la Maison Blanche et quels pourraient en être les points bénéfiques et négatifs pour la France et l’Europe.

L’ex 45ème et désormais futur 47ème Président des États-Unis d’Amérique s’emploiera à n’en pas douter durant les quelques semaines qui nous séparent de la cérémonie d’investiture du 20 janvier 2025 au Capitole à composer un cabinet qui satisfera les différents segments de son électorat et les différentes écuries idéologiques qui composent désormais le trumpisme : les non-interventionnistes, les néo-protestants évangéliques, les isolationnistes, les juifs likoudniks, les prométhéens, les libertariens, les conservateurs catholiques, les ex-Démocrates populistes, les protectionnistes ou encore les minarchistes.

Comme on peut le voir très rapidement dans cette liste, le trumpisme n’est pas une doctrine politique identifiée et identifiable. C’est une auberge espagnole regroupant divers courants doctrinaux voire religieux qui se coagulent pour tenter de mettre à bas un complexe médiatico-politique sclérosé et un establishment corrompu et post-national.

Conquête spatiale, remigration et nourriture saine

Trois figures emblématiques de la campagne joueront très certainement un rôle de premier plan en ce début de seconde présidence Trump.

Elon Musk sera probablement chargé de mener un audit afin de réformer l’administration américaine. Mission qui ne devrait pas déplaire à ce libertarien qui s’inspirera probablement de Chris Edwards et de son Downsizing the Federal Governement. Musk pourrait réduire les dépenses publiques de 1 000 à 2 000 milliards de dollars.

SpaceX, Tesla et Starlink décrocheront probablement de nouveaux contrats publics majeurs et Musk sera un conseiller incontournable pour toutes les questions liées aux IA, la robotisation et bien évidemment la conquête spatiale.

Pour rassurer les forces armées et les tenants de l’école réaliste qui sont opposés au bellicisme des neo-cons, Tulsi Gabbard, ex-candidate aux primaires du parti de l’âne (les Démocrates) en 2020, semble toute désignée pour occuper un poste de choix dans la future administration Trump.

Cette femme née aux Samoa américaines, ayant grandi à Hawaï, pourrait se voir proposer un poste de Secrétaire d’État ou de Secrétaire à la Défense. Elle n’a d’ailleurs pas fait mystère de son intérêt pour l’un de ces deux portefeuilles. 

Tulsi Gabbard, qui s’était portée volontaire en 2005 pour un déploiement d’un an en Irak avant de retourner au Proche-Orient en 2009 toujours volontairement, est notamment connue pour avoir défendu un désengagement américain dans la guerre menée contre la République arabe syrienne, pour avoir mis en garde contre le péril nucléaire qui menace dans le cadre du conflit russo-ukrainien et pour avoir fustigé la politique consistant à déverser des milliards de dollars (60 pour être précis depuis février 2022) pour alimenter ce véritable hachoir à viandes qu’est devenue justement la guerre en Ukraine. 

A l’instar d’autres soutiens de Donald J. Trump, Gabbard estime que ces milliards auraient été plus utiles pour mettre fin à la crise de la frontière sud (Southern border crisis). Frontière sud devenue une véritable passoire sous Biden-Harris et qui ferait passer l’espace Schengen pour une forteresse imprenable.

Une partie des sommes gigantesques allouées à l’Ukraine (1) pourrait être réorientée vers la sécurisation de la frontière américano-mexicaine et pour lancer une opération de remigration de grande envergure des immigrants entrés illégalement sur le sol américain au cours des quatre dernières années.

Enfin, l’autre personnage qui interprétera un rôle-clef sera l’ancien troisième candidat à la présidentielle : Robert F. Kennedy Junior. 

RFK Jr pourrait obtenir une position spéciale, indépendante de l’approbation du Sénat, mais avec une capacité d’influence importante dans son domaine de prédilection : la Santé.

Kennedy n’a eu de cesse de mettre en garde contre les expériences de « gain de fonction » menées pour développer délibérément des agents pathogènes hautement virulents et facilement transmissibles, dans le but déclaré de mettre au point des vaccins préventifs contre les virus animaux avant qu’ils ne passent à l’homme. 

RFK Jr a aussi dénoncé avec véhémence les mesures liberticides durant la tyrannie covidiste portées par l’infâme Anthony Fauci, les pratiques indéfendables des grandes firmes pharmaceutiques (Big Pharma) ainsi que celles tout aussi inexcusables de l’agro-alimentaire (emploi des additifs par exemple).

Les responsables de la campagne de Trump ont affirmé que l’objectif serait de « rendre l’Amérique à nouveau en bonne santé » en s’attaquant aux causes profondes des maladies chroniques infantiles (obésité et diabète en particulier).

En résumé : des projets de vols spatiaux sur Mars, une nourriture saine et des aliments non-transformés (healthy food) et des expulsions massives de clandestins (deportation).

Mutatis mutandis, tout cela n’est pas sans rappeler l’archéofuturisme cher au regretté Guillaume Faye.

Canceller les wokes intersectionnels

Il est également légitime d’espérer une lutte pied à pied contre l’insupportable wokisme, ce freudo-marxisme 2.0 ainsi que contre son funeste corollaire la culture de l’annulation (cancel culture). Une lutte indispensable sur les plans juridique, médiatique, universitaire et économique devra s’engager et s’appuyer sur tous les leviers dont bénéficiera désormais cette nouvelle présidence Trump.

Un combat civilisationnel qui sera peut-être facilité par une Cour Suprême majoritairement conservatrice, une Chambre des Représentants qui semble demeurer républicaine à l’heure à laquelle ces lignes sont écrites, un Sénat tombé dans l’escarcelle du GOP (Grand Old Party) et enfin pour assurer le SAV médiatique la plateforme X (ex-Twitter) qui sera également mise à contribution (2).

Une réussite du camp Trump dans ce domaine aurait des répercussions vraisemblablement extrêmement positives de ce côté-ci de l’Atlantique.

Vers l’aboutissement de la révolution crypto ?

Enfin, on peut raisonnablement espérer que cette équipe gouvernementale misera sur l’essor des

cryptomonnaies pour contrer la toute-puissance des banques centrales et de la Fed en particulier.

Dans le même temps, on peut là aussi raisonnablement penser que cette administration mettra un coup d’arrêt (définitif ?) au projet des monnaies numériques (CBDC) justement portées par les banques centrales (3).

Monnaies numériques qui constituent le double-maléfique des cryptos et qui surtout forment la pierre angulaire du projet de domestication sociale des populations. Projet de domestication sociale si cher à la ploutocratie transnationale.

Distorsion de concurrence et guerre commerciale à venir
Quelles sont les grandes menaces qui pèsent sur la France et l’Europe avec ce retour de Donald Trump au 1600 Pennsylvania Avenue à Washington D.C ?

Sur le plan économique, la mise en place de droits de douanes très élevés (une politique parfaitement légitime et logique pour un homme promouvant le protectionnisme) risque de coûter très cher aux secteurs français et européen tournés vers l’export.

La baisse envisagée de l’impôt sur les sociétés de 21 à 15% pourrait rendre les entreprises états-uniennes plus compétitives au détriment des européennes plus lourdement imposées.

En revanche, la lutte contre l’inflation qui était au cœur de la campagne Trump se traduira possiblement par une baisse des coûts de l’énergie. Baisse des coûts de l’énergie qui sera consécutive à une augmentation de la production locale de gaz et de pétrole. « On va forer (du pétrole) comme des malades« , a-t-il annoncé afin de faire « baisser très rapidement les prix de l’énergie« . Trump souhaite en effet intensifier les forages en Arctique, pour augmenter les stocks. 
Une politique qui s’avérera peut-être profitable par ricochet au consommateur européen mais qui se conclura potentiellement par des désastres écologiques d’ampleur.

Le poids du lobby pro-israélien

La plus grande inquiétude concernant ce nouveau mandat Trump sera la même qu’en 2016, à savoir : son attitude dans le conflit Iran-Israël.

Lors du premier mandat, l’administration Trump avait affiché deux constantes au Proche-Orient :  briser les réseaux jihadistes  et accentuer l’isolement de l’Iran. 
La seconde constante avait eu notamment comme traductions spectaculaires la fin de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien appelé JCPoA (un des rares succès probant du double mandat Obama) et l’élimination de Qassem Soleimani.
Il faut également ajouter l’installation de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem  et la reconnaissance de la souveraineté de Tel-Aviv sur le Golan syrien.

Le soutien apporté par Miriam Adelson, veuve du milliardaire Sheldon Adelson ou encore de l’influenceur Ben Shapiro, ajouté aux déclarations fracassantes de The Donald durant la campagne ne laissent nullement présager d’un rééquilibrage en la matière. Sans compter qu’il faudra toujours montrer patte blanche à l’AIPAC (American Israel Public Affairs Committee) ainsi qu’aux protestants sionistes (revoir les travaux de John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt à ce sujet).

De plus, des soupçons de projets d’assassinat du candidat Trump fomentés par l’Iran ont circulé au cours des dernières semaines de campagne. Élément qui, nous en conviendrons aisément, ne risque guère de calmer le courroux du président-élu envers Téhéran.

Cependant, l’ancienne vedette de l’émission de télé-réalité The Apprentice, est habituellement salué pour son pragmatisme. Or, comme Trump l’a déjà déclaré : « la politique des sanctions est mauvaise pour le dollar ». Donc, il n’est pas impensable d’envisager un adoucissement de sa politique envers l’Iran pour maintenir « le privilège exorbitant » du billet vert.  

Mettre en branle un processus de désescalade et afficher une volonté de rupture avec « la montée aux extrêmes » au Proche-Orient serait profitable pour tout le monde. 

Y compris les Européens.

Maurice Gendre

(1) Qu’adviendra-t-il de l’Ukraine ? La neutralité de l’Ukraine sera imposée par le Kremlin (interdiction d’intégrer l’OTAN) et Trump ne s’y opposera pas. On peut supposer qu’un projet de fédéralisation de l’Ukraine n’est plus du tout à l’ordre du jour. Par l’organisation de son référendum-annexion, Poutine a clairement fait comprendre que les oblasts de Kherson, Zaporijjia, Donestk et Lougansk étaient désormais non-négociables. Quant à la Crimée, il n’est même plus question d’en parler. Seule inconnue : qu’en sera-t-il d’Odessa ?

Pour les nationalistes ukrainiens, la Crimée et le Donbass constitueront leur Alsace-Moselle. Et ils n’y renonceront jamais. Et on ne peut que les comprendre. Il faut donc se faire à l’idée que même après un armistice ou un traité de « paix », la guerre redémarrera probablement un jour ou l’autre.

(2) La mise en place du Projet 2025 de la Heritage Foundation, document de 900 pages, qui vise notamment à remplacer des dizaines de milliers de fonctionnaires fédéraux et à renforcer le pouvoir exécutif (exécutif unitaire) sera également probablement plus facile à mettre en place grâce aux victoires au Sénat et à la Chambre des Représentants.

(3) «Ce soir, je fais une nouvelle promesse pour protéger les Américains de la tyrannie gouvernementale. Je n’autoriserai jamais la création d’une monnaie numérique par une banque centrale». Promesse faite par Donald Trump le 17 janvier 2024 à Portsmouth, dans le New Hampshire.

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