Comme je l’avais évoqué dans une récente chronique, je reçois depuis peu, en service de presse, les publications d’une maison d’édition nommée Kontre Kulture. A la longue j’ai compris que l’intellectuel Alain Soral, autrefois communisant pour ne pas dire communiste (il avait alors toutes les qualités, à lire les médias mainstream de l’époque) et aujourd’hui passé dans le camp adverse (les mêmes médias mainstream lui trouvent désormais quantité de défauts), est un peu le gourou de cette maison, disons une sorte de maître à penser. Ce qui est indubitable, c’est que cet Alain Soral est un authentique non-conformiste, avec la bonne part d’inconscience que recouvre cette notion, à commencer par la part d’ennuis personnels.
Dans la rafale des plus récents services de presse de Kontre Kulture, je trouve trois livres signés de Soral : Vers la féminisation, et Comprendre l’Empire (deux rééditions), et Plus con tu meurs ! publié en octobre. Il s’agit d’essais, un genre dont je ne raffole pas, à l’exception notable des essais littéraires. Mais ce n’est pas exactement l’objet de ces trois livres…
Le premier d’entre eux, Vers la féminisation (apparemment la réédition d’un ouvrage paru en 1999),s’en prend à ce que Soral estime être une supercherie, la féminisation de la vie publique, qui efface toute vision collective d’avenir, qui serait une approche plus typiquement masculine. J’espère, par ce résumé extrêmement synthétique, ne pas avoir trahi trop gravement la pensée de celui qui se veut non seulement essayiste, mais aussi « polémiste, cinéaste et romancier ». Un touche-à-tout en quelque sorte.
« Ce n’est pas un livre pour moi », me suis-je dit au premier abord. Non pas que je sois une néo-suffragette délirante, mais le débat lui-même ne me passionne pas. Cependant je ne peux résister au plaisir de vous faire découvrir les premières lignes de la présentation de l’ouvrage en quatrième de couverture, rédigées sans doute par Soral lui-même :
« La femme est l’avenir de l’homme ». Cette sentence devenue célèbre résume à elle seule le crédo de l’époque. Que le poète qui l’a prononcée ait vécu en stalinien et fini pédé devrait pourtant inciter à la prudence, voire à la réflexion. »
A de petites phrases comme celles-là, on en arrive à penser que Soral n’est pas qu’un provocateur. Il y a peut-être comme une étincelle de génie, et un indéniable courage chez cet homme.
Le second ouvrage soralien s’intitule donc Comprendre l’Empire, avec comme sous-titre : Demain la gouvernance globale ou la révolte des nations ? ». Il s’git là aussi de la réédition d’un titre paru il y a 13 ans. Le sujet est classique. Je me souviens avoir lu, très jeune, un essai de ce genre intitulé Bientôt un gouvernement mondial, et sous-titré « Une super et contre-Eglise ». L’ouvrage, que m’avait donné mon grand-oncle Brigneau, était signé d’un dénommé Pierre Virion. D’orientation traditionaliste, Virion était proche de l’Action française, et il avait collaboré à la Revue Internationale des Sociétés Secrètes de Monseigneur Jouin, ce qui n’était pas rien. A l’époque Virion s’inquiétait du risque d’avènement d’un inquiétant « nouvel ordre mondial ». S’il vivait encore il serait rassuré, aucun « nouvel ordre mondial » n’a fait son apparition. J’ai plutôt l’impression qu’un désordre mondial émerge progressivement. Ce qui n’est pas plus réjouissant, au fond, que l’ordre mondial que craignait Virion !
Quant au troisième livre, Plus Con tu Meurs !, il est beaucoup plus facile et agréable à lire puisqu’il s’agit de « texticules » comme les appelle drôlement Soral. Il y a beaucoup de bonnes formules, beaucoup d’impertinence, dans ces aphorismes, qui frôlent parfois, voire dépassent les limites du judiciairement correct. Des trois ouvrages, c’est celui-ci que je vais conserver et lire d’un bout à l’autre, crayon à la main, Et je pense que mon précieux et très personnel « carnet de citations » va m’être très utile pour conserver certaines de ces formules.
Oui vraiment, cet ouvrage-là, qui n’est donc pas vraiment un essai, je vous le conseille. N’attendez pas qu’il soit saisi et mis au « pilon républicain ».
Dans son préambule, notre essayiste se fait d’ailleurs peu d’illusions sur l’avenir de l’ouvrage… et même le sien propre : « « De ces notes que j’accumule depuis 2012, j’hésitais à en faire un livre. Un livre dans le contexte totalitaire actuel, ce sont forcément des emmerdes… ».
Madeleine Cruz
Vers la féminisation, par Alain Soral, septembre 2024, 144 p.
Comprendre l’Empire, par Alain Soral, octobre 2024, 236 p.
Plus Con tu Meurs !, par Alain Soral, octobre 2024, 274 p.