Comme chaque semaine ou presque, j’accomplis un aller-retour Argenton-sur-Creuse – Paris en train, à partir de la gare d’Austerlitz. Comme chaque semaine ou presque, je suis témoin de problèmes avec des passagers sans billets…sans papiers…sans argent…
Ce lundi 3 avril à 20 heures, la contrôleuse interroge l’individu occupant le siège juste derrière le mien. Il n’a pas de billet. Il ne parle pas français, dit-il.
La contrôleuse finit par comprendre qu’il n’a pas non plus de papiers d’identité, et qu’il est Afghan.
Elle part chercher des collègues. Ils se retrouvent donc à trois, dont une contrôleuse qui se débrouille en anglais, pour l’interroger, essayer de résoudre son cas au mieux. J’admire au passage la patience de l’équipe.
L’homme prévoit de descendre à La Souterraine, une gare avant Limoges.
La contrôleuse lui explique qu’il faut payer 60 euros pour ce défaut de billet, dans un train où la réservation est obligatoire.
Il n’a pas d’argent, prétend-t-il, tout en continuant à parler, par téléphone portable dernier cri, avec un compatriote. La discussion semble n’avoir strictement aucun rapport avec l’incident qui se déroule simultanément.
Commence alors une extravagante négociation entre une contrôleuse, qui se débrouille correctement en anglais, et l’individu :
Elle lui explique finalement qu’elle accepte de lui faire une fleur et qu’elle peut lui délivrer le billet au tarif de 20 €, ce qui doit correspondre, je suppose, au tarif de base normal.
Il refuse, car il n’a pas d’argent, et finit, de guerre lasse, comme pour avoir la paix et poursuivre son intéressante discussion téléphonique avec son compatriote, par lui donner … dix euros. On se croirait au Souk de Kaboul !
Pour sa part, la contrôleuse semble heureuse de cette conclusion pacifique ; elle encaisse les dix euros et lui délivre son billet. Elle en profite pour tenter de lui expliquer que les appels téléphoniques se passent sur la plateforme. Mais apparemment, sur ce point précis, elle ne réussit pas à se faire comprendre puisque l’individu poursuivra sa discussion à voix haute pendant tout le trajet (deux heures), discussion entrecoupée il est vrai de pauses musicales extrême-orientales.
A mon prochain aller-retour, je testerai le contrôleur : je ne présenterai ni billet ni pièce d’identité, et tenterai de négocier un billet à dix euros, tout en téléphonant depuis ma place.
Les lecteurs du nouveaupresent.fr auront bien entendu la primauté de mon test, que l’on pourrait baptiser « test de soumission ».
Francis Bergeron