Bédéthèque

Rubrique Bédésup : une bédéthèque fasciste ?

Réfléchir & Agir, revue que l’on pourrait qualifier « d’ultra » publie un hors-série (réservé aux abonnés) consacré à la bande dessinée, sous le titre Bédéthèque fasciste. On s’attend à lire une étude savante sur les bandes dessinées. Il s’agit en fait d’un patchwork mettant à l’honneur les BD qui reflètent non les traits caractéristiques du fascisme (historique ou fantasmé) mais les coups de cœur des coauteurs, notamment Aristide Leucate, Guillaume Travers, et Pierre Gillieth, bien entendu, qui est le maître d’œuvre de ce numéro.

On se permettra d’abord de chicaner ce dernier sur le fait de qualifier de « fasciste » ce qu’il aime, qu’il s’agisse de films, de littérature ou de bande dessinée. Nous sommes de ceux qui ne considèrent le fascisme que comme un régime politique italien de la période 1922-1945, avec sa part de lumière et d’ombres, appartenant donc désormais à l’Histoire. Se réclamer aujourd’hui du fascisme (ou de l’antifascisme, d’ailleurs) relève davantage de l’uchronie que de la science politique.

La mise en valeur d’auteurs engagés

Ce qui ne signifie nullement que la petite bédéthèque qui nous est présentée soit dénuée d’intérêt, ne serait-ce qu’en raison de l’adage : « montre-moi ta bibliothèque et je te dirai qui tu es ». Dans le domaine de la BD « classique », Gillieth et ses amis aiment Jean-Michel Charlier, Jacobs, Tibet et Duchateau, Floc’h et Rivière, Jean Dufaux et Terpant, Chaland, Stalner, Swolfs, c’est-à-dire, notamment, Marc Dacier, Blake et Mortimer, Ric Hochet, Blueberry, Dimitri (Guy Sajer), Francis Albany et Olivia Sturgess, Durango, Freddy Lombard, Nez-de-Cuir. Ils ont mille fois raison, bien entendu.

Ils mettent également en valeur des auteurs plus engagés comme Jack Marchal, Rémi de la revue Balder, les frères Simon (qui signaient Minos dans Minute), Marsault, Dioclétien, Sergueï et Olric. Ces auteurs et dessinateurs méritent d’être réédités, promus, mis en valeur, car les portes des grands éditeurs, les micros et les caméras des grands médias, leur ont été ou leur sont rarement ouverts.

Gillieth fait également grand cas de l’album Le vaisseau de pierre, de Christin et Bilal, et Guillaume Travers de l’album Bran Ruz d’Auclair et Deschamps, des ouvrages celtisants qui méritent certainement le détour.

Enfin nous ne suivrons pas la petite équipe dans son incitation à une lecture au second degré de BD communistes comme Rahan, ou de celles de Bucquoy « que l’on peut apprécier en oubliant ce qu’elle est censée dénoncer », écrit Gillieth. Un exercice mental trop compliqué pour nous. Quant à la série Hessa, traduite de l’italien, et qui réunit « sexe, national-socialisme et aventure », selon la recension qui en est faite, nous en laisserons la lecture aux amateurs du genre…

Agathon

Bédéthèque fasciste, hors-série n° 8 de Réfléchir et Agir, 32 pages, 2023.

Site internet : https://reflechiretagir.com/

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