A ma connaissance, il n’existait pas de dictionnaire des grandes figures contre-révolutionnaires. Certes la plupart des personnalités qui s’opposèrent au mouvement révolutionnaire, à la fin du XVIIIe siècle et au XIXe siècle, sont déjà dans les dictionnaires, qu’il s’agisse des figures majeures de la contre-révolution intellectuelle, illustrée notamment par Maistre, Bonald, Rivarol, Barruel, Le Play ou Mallet du Pan, ou des héros la contre-révolution « militaire ».
On pense alors à tous ces personnages mythiques de la chouannerie et de la Vendée en armes, que nous chérissons à juste raison. Bien entendu nous retrouvons souvent ces personnages via les index de noms cités, des études historiques majeures, sur cette période. Mais la synthèse d’Yves Morel est loin de faire double emploi. Car le premier mérite de ce qui peut être qualifié de compilation, c’est de les avoir regroupés, précisément. Du même coup le travail qu’il publie en deux tomes constitue un outil, un « usuel », auquel on peut se référer à longueur d’année et qu’il est sage de garder toujours à portée de main. Il s’adresse autant aux historiens, aux grands érudits qu’aux simples lecteurs et amateurs d’histoire et en particulier d’histoire de cette période-là, bien entendu.
Qui plus est, les rubriques ont été soigneusement rédigées par Yves Morel, qui est docteur ès lettres, spécialisé en Histoire. On doit notamment à Morel des biographies de Georges Valois, Marcel Bucard, Abel Bonnard ou encore celle du militant roumain d’avant-guerre Corneliu Codréanu, des figures qui ne touchent qu’incidemment à l’univers de la contre-révolution, si l’on entend n’appliquer ce qualificatif qu’aux Français qui refusèrent, voire combattirent le chamboulement mortifère né le 14 juillet 1789 (et même un peu avant).
Eclectisme de bon aloi
Mais l’éclectisme des travaux d’Yves Morel est de bon aloi, car il confirme à la fois son esprit de curiosité et son non-conformisme.
Pour ce qui concerne les écrivains contre-révolutionnaires au sens strict du terme, Yves Morel était déjà l’auteur d’un ouvrage sur « la vraie pensée d’Augustin Cochin », un historien de grande qualité mais méconnu, sans doute en raison de sa disparition précoce (à l’âge de 40 ans), au champ d’honneur.
Le travail d’Yves Morel est le genre de livre qu’on garde sous la main, afin de pouvoir s’y référer autant de fois que nécessaire quand nos lectures ou nos travaux d’écriture nous conduisent à rencontrer l’une ou l’autre de ces figures de la résistance antitotalitaire. On ne s’y réfèrera jamais assez.
Madeleine Cruz
Les contre-révolutionnaires français par Yves Morel (2 volumes parus, respectivement 232 pages et 308 pages,), Atelier Fol’Fer, 2024 et 2025
