Il y a quelques mois j’avais évoqué la difficulté des riches «d’entrer dans le Royaume des cieux. (Mathieu 19-24). Il semble que ça devient de plus en plus difficile. Qu’on en juge.
Gagner 14 Millions de dollars par heure
Depuis 2020, les cinq hommes les plus riches du monde ont vu leur fortune doubler (+114%), tandis que la richesse cumulée de 5 milliards de personnes a diminué.Les milliardaires ont accru leur fortune de 3 300 milliards de dollars depuis 2020, une croissance trois fois plus rapide que l’inflation. Les 1 % les plus riches possèdent 48 % de tous les actifs financiers mondiaux. Le rapport d’Oxfam,« Multinationales et inégalités multiples » publié au moment même où se réunit le WEF, ( World Economic Forum) révèle que la fortune des cinq hommes les plus riches du monde a plus que doublé depuis 2020, passant de 405 milliards de dollars à 869 milliards de dollars, « ce qui représente une augmentation de 14 millions de dollars par heure », explique l’ONG, organisation fondée en Grande-Bretagne en 1942, dans son communiqué de presse. Cette organisation est certes bien ancrée à gauche mais dont les chiffres sont fiables..
Oxfam révèle que si cette tendance persiste, dans une décennie, nous pourrions assister à l’émergence du premier multimilliardaire à 1000 milliards de dollars, alors que l’éradication de la pauvreté nécessiterait encore 230 ans. «Au rythme actuel » !
En France, depuis le covid, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros.
Le massacre des classes moyennes
Parallèlement, la richesse de 90% des Français a baissé, notamment à cause de l’inflation. En 2008, le PIB de l’UE était équivalent à celui des US. En 2023, il est inférieur de 80%. C’est l’exacte mesure de l’ampleur du déclassement français depuis 1992. Au premier rang la classe moyenne. Ce groupe de la population est compris entre les 50 % les plus pauvres et les 10 % les plus riches. Par exemple, le salaire d’entrée des professeurs de collège avoisinait 2,2 fois le salaire minimum en 1980 contre seulement 1,2 aujourd’hui. La part du patrimoine de la classe moyenne est redescendue à 35 % du total en France, au profit des 10 % d’ en haut. FX Bellamy qu’on ne peut qualifier d’extrémiste juge sévèrement l’homme-qui -voulait -mettre- à- genoux -l’économie- russe : « Le prix de l’électricité a déjà connu une augmentation record de 31% l’an dernier. Alors que les prix de gros baissent enfin, le gouvernement en profite pour rétablir une taxe plutôt que de laisser les Français respirer. Ce choix de l’asphyxie fiscale est désastreux pour le pays. »
L’abaissement social de la classe moyenne aux USA est pareillement manifeste. En 1960: le coût de la maison moyenne était de deux ans de salaires, en 2023, il est de six ans. En France c’est plus, compte tenu du tassement des salaires et de la hausse de l’immobilier. Et voilà que Macron et Attal découvrent la classe moyenne, dont le terme se met à orner leur discours au moment même où elle est en train d’être broyée. Selon l’INSEE, les Français sont sortis de la pandémie plus pauvres qu’ils n’y sont entrés. Mais pour les plus pauvres l’état intervient plus fortement.
Une pauvreté aidée qui ne recule pas.
La pauvreté s’accroît en France, selon le Secours catholique qui note que le niveau de vie médian a baissé de 7,6 % en un an, 14,5 % des Français vivent sous le seuil de pauvreté. Plus de neuf millions de personnes vivaient donc, sous le seuil de pauvreté monétaire, d’autres sources citent le chiffre de 11 millions établi à 60 % du revenu médian soir un peu plus de mille euros par mois. Globalement, les budgets sociaux sont à destination des plus défavorisés et particulièrement les femmes, de telle sorte que la partie inférieure de la classe moyenne frise la pauvreté. Mais, à dire vrai, dans les explications, il y a aussi recul des aides mises en place lors de la pandémie de Covid et la non-reconduction de la majoration de l’allocation de rentrée scolaire. La réforme des APL est aussi en cause d’après l’Insee, le niveau global des aides versées a baissé depuis son entrée en vigueur en janvier 2021. Résultat : presque un quart (20,6 %) des enfants vivant en France en 2021 étaient en situation de pauvreté. Enfin l’inflation joue son rôle, elle a contribué à faire baisser les niveaux de vie puisque les prestations sociales, en théorie alignées sur le taux d’inflation de l’année précédente, augmentent moins vite que les prix.
Le budget de la sécurité sociale pour 2024 est fixé à 640 milliards d’euros. Pour 2023, le déficit social est estimé à 8,7 milliards d’euros, nous approchons donc des 650 milliards et, pour le régalien : 299,7 milliards d’euros et un déficit budgétaire de 144,5 milliards d’euros (à financer sur les marchés).
Plus que jamais il faut se poser la question de Coluche, ou comment la dérision éclaire la raison : « Mais où passe notre pognon ? »
Olivier Pichon