Que les Meusiens, les Mosellans, les Berrichons ou les Lot et Garonnais se soient laissé tenter par un vote « d’extrême droite », rien d’étonnant. Ce sont des pays de bouseux, de sans-dent, l’inculture y est forte. Personne là-bas ne lit Télérama ou Le Monde!
Déjà pourtant, les scores des précédentes élections laissaient craindre un score significatif pour la liste Bardella, même en Bretagne. Nous y sommes, et ce constat constitue comme
Ces terres historiquement démocrates chrétiennes, modérées, gaullistes mais pas trop, UMP, LR, MODEM…ces territoires surveillés par des villes ayant progressivement basculé vers le PS ces vingt dernières années, cette région qui a depuis lors donné à la France de si belles figures de gauche : Ayrault, Le Foll, Le Drian, Edmond Hervé, tant d’autres… pouvait-on imaginer qu’elle succombe aux sirènes de la droite ? Que dis-je, de « l’extrême droite » ?
Il y avait eu Jean-Marie Le Pen
Bien entendu, il y avait eu Cadoudal. Mais c’était de l’histoire ancienne. Et il y avait eu Jean-Marie Le Pen. Mais le bougre n’avait jamais réussi à se faire élire en Bretagne (même s’il a parfois dépassé les 50% dans sa ville natale de La Trinité-sur-Mer).
Or voici que ce 9 juin 2024, la Bretagne s’est laissé séduire par le parti de sa fille (et de Jordan Bardella, bien entendu). 25,6% ! Certes c’est un chiffre qui se situe presque six points au-dessous de son score national à cette même élection (31, 3%). Mais sa liste est arrivée en tête, distançant ici aussi la liste socialiste (18,4%), ce qui était tout simplement inimaginable, dans un passé récent. Un véritable crime de lèse-majesté. D’autant que la liste macroniste, avec 17,4% n’est elle-même arrivée que troisième.
Certes une élection législative, qui se joue à deux tours, ne garantit pas pour autant des sièges de députés aux champions du premier tour, avec un premier tour des législatives qui se situerait dans les mêmes eaux. Néanmoins depuis le 9 juin, dans la perspective des scrutins des 30 juin et 7 juillet, tout ce que la France compte de politologues, de sociologues, d’experts en extrême droite (et cette race-là est innombrable !) se penche sur le cas de la Bretagne.
Mais qu’est-ce qui leur a pris ? C’est « une vraie rupture dans cette région historiquement réfractaire au Front national » constate Le Figaro. « Les raisons sont multiples », nous dit Ouest-France. Mais encore ?
En Ille et Vilaine, la liste Bardella a obtenu 22,2%. Honorable, sans plus. 22,6% en Loire atlantique (département non rattaché à la région Bretagne, contre toute logique, notamment historique), 24,9% dans le Finistère, 28,2% dans les Côtes d’Armor, 28,6% dans le Morbihan. Là, c’est vraiment du jamais vu. Le parti à la flamme se retrouve donc avec un socle d’électeurs supérieur à celui de tous les autres partis. Et les sondages en vue des législatives ne laissent pas supposer que la marée va se retirer.
Que nous disent les professeurs de sciences politique et autres experts occupés actuellement à ausculter le vieux pays breton ? Il y a la détestation de Macron, trop parisien, trop élitiste, trop distant. Il y a le constat que la Bretagne, comme toutes les provinces, est devenu un désert, désert médical, et souvent aussi désert industriel, et que les villes rurales, l’intérieur de la province, sont en proie à une sorte de liquéfaction des services publics.
Il y a aussi ici la montée des violences et de l’insécurité, qui n’épargne plus les campagnes. Il y a enfin l’immigration rampante, les CADA où des clandestins en attente de régularisation vivent parfois mieux que bien des gens du cru, constatent les Bretons.
En, dernière analyse, il reste les gens, atomisés sur le territoire, alors que les villes de la côte s’en sortent, par le tourisme, et votent souvent encore pour la droite traditionnelle, n’ont pas encore franchi le pas, les habitants restant protégés par un prospère entre-soi… et des myriades de caméras . Quant aux grandes villes, généralement gérées par le PS, elles concentrent une bourgeoisie élitiste, qui sait tirer parti du quadrillage d’associations culturelles, sportives etc. contrôlées par la gauche. La soviétisation heureuse…Restent les banlieues, de plus en plus criminogènes, de plus en plus islamisées, de plus en plus sensibles, aussi aux thèmes du Rassemblement national.
Le niveau atteint par le RN en Bretagne est encore insuffisant pour offrir la perspective d’élire ici un nombre significatif de députés de droite. Car pour que le « front républicain » se fissure, il faut dépasser les 30%. Nous n’y sommes pas encore, ici. Mais on s’en rapproche à chaque scrutin.
Agathon