La chute et la fuite précipitée du président Bachar Al-Assad, et l’irruption au pouvoir à Damas des rebelles islamistes du HTS (Hayat Tahrir al-Sharm – ces derniers n’offrant à ce jour, pas plus de vertu démocratique que leur prédécesseur comme tous les régimes de la région ! -, a amené la Syrie à changer de drapeau. Elle a retrouvé les couleurs de l’indépendance proclamée en 1946. Ce drapeau à trois bandes égales horizontales, vert, blanc, noir – la bande centrale étant frappée de trois étoiles rouges à cinq branches – , avait déjà flotté à Alep, seconde ville du pays, en 1932, avant d’être officialisé quatre ans plus tard dans la Syrie mandataire, sous tutelle française.
Il reprenait les couleurs de la révolte arabe contre les Turcs, déployées pendant la Première guerre mondiale. Les trois étoiles symbolisaient les trois districts d’Alep, de Damas et de Deir ez-Zor, qui remplaçaient les « États » du Levant sous mandat français : États d’Alep, de Damas et les zones Druze et Alaouïte de Lattaquié *. Le Sandjak d’Alexandrette, lui – provisoirement République indépendante du Hatay (1937-1939) -, était annexé par la Turquie. Ce drapeau tricolore étoilé, a été hissé aux hampes syriennes de 1932 à 1958, et rétabli de 1961 à 1963. Le Conseil national syrien l’adoptera le 4 novembre 2011 comme étant l’emblème officiel des opposants au régime baassiste.
La fusion Egypte/Syrie donne naissance à la RAU
Entre février 1958 et septembre 1961, la Syrie était devenue la province du Nord de la République arabe unie (RAU) sous l’égide du colonel Nasser, l’Egypte étant la province du Sud de ce nouvel État. Il arborait un drapeau rectangulaire à trois bandes horizontales rouge, blanche et noire, la bande blanche étant frappée de deux étoiles vertes, chacune d’elle symbolisant l’un des deux pays fédérés. Mauvais mariage, mais bon divorce, la Syrie reprenait ses billes après un coup d’état militaire largement approuvé par le peuple, cette union n’ayant pas répondu aux espérances des Syriens. Avec cette sécession de la Syrie le 28 septembre 1961, le pays retrouvait le drapeau de son indépendance qui sera en vigueur jusqu’en1963, année à partir de laquelle elle allait afficher un nouvel emblème s’inspirant des couleurs de la défunte République arabe unie (RAU). Ce nouveau drapeau syrien était rectangulaire, la longueur étant le double de la largeur. La bande supérieure rouge symbolisait le sang des martyrs, le blanc représentait la couleur de la dynastie des Omeyades, et le noir la fin de l’oppression par la colonisation étrangère. Quant au vert des étoiles, il figurait le Califat des Rachidoune (Rashidoun, 632 – 661). Ces trois étoiles à cinq branches qui parsemaient à égale distance l’une de l’autre la bande centrale, rappelaient celles du premier pavillon de 1932.
Encore une union ratée
En 1972, une nouvelle et éphémère « union » de pays arabes rassemblait à nouveau l’Egypte et la Syrie, rejointes par la Libye. Ces trois pays choisissaient un drapeau unique aux trois couleurs traditionnelles – rouge, blanc, noir -, la nouveauté étant que dans la bande centrale un faucon stylisé doré (Quraych), remplaçait les étoiles. Mais une fois de plus – une fois de trop ? -, l’union ne se réalisa pas. Elle fut dissoute en1977, l’Egypte conservant, toutefois, ce drapeau. La Libye de Kadhafi quant à elle, devenant la Jamahiriya libyenne, adoptait un étendard rectangulaire, totalement vert. Il faudra attendre 1980 pour que la République arabe syrienne sous l’égide d’Hafez al-Assad – le père de Bachar -, à la tête du parti Baas (Ba’th) – parti socialiste de la résurrection arabe -, adopte, un nouveau drapeau reprenant les couleurs et le design de celui de la RAU. Le 8 décembre 2024, Il disparaît du paysage, avec l’irruption des rebelles à Damas, et leur mainmise partielle sur le pays. À nouveau le vert/blanc/vert des temps héroïques de l’indépendance flotte sur la plus grande partie du pays.
Jean-Claude Rolinat