Gaza

Reconnaître l’État palestinien. Mais quel État, et dans quel état ?

Le 24 juillet, Emmanuel Macron a officiellement annoncé que, présent en septembre à la prochaine Assemblée générale des Nations Unies, il se prononcerait au nom de la France pour la reconnaissance de l’État palestinien. Il confirmait ainsi sa déclaration du 30 mai à Singapour sur la nécessaire création d’« un véritable État palestinien, dont la reconnaissance n’est pas simplement un devoir moral, mais une exigence politique ». Position qui l’avait fait accuser par le gouvernement israélien de lancer une « croisade contre l’État juif » cependant qu’à Paris, le Conseil représentatif des Institutions juives de France (CRIF) condamnait une inexcusable « faute morale et politique ».

Perseverare diabolicum, donc mais il est vrai que, depuis quelques mois, la situation n’a cessé de s’aggraver dans la bande de Gaza sous l’effet des bombardements, des constants déplacements forcés de population et maintenant de la famine planifiée par l’Israël et qu’on ne peut donc que compatir au martyre des persécutés. Toutefois, l’Élyséen ne semble pas se ranger dans la catégorie des ultra-sensibles et l’on peut se demander si ce qu’il présente comme une « exigence politique » ne résulte pas du constat que désormais, et du moins sur le plan électoral, la communauté juive ne fait plus le poids devant la masse des électeurs allogènes et leur capacité de nuisance, dans la rue et les médias notamment.

Mais, outre que ceux des musulmans qui nous sont les plus hostiles se fichent souvent des malheurs de leurs « frères » de Gaza, il ne suffit pas de prôner la « reconnaissance de l’État palestinien » pour que celui-ci éclose comme par magie.

Voilà des décennies que Tel Aviv n’a cessé de miner toute cohésion politique entre les Palestiniens (d’où le financement massif et la promotion du Hamas, aux dépens de l’Autorité palestinienne) ainsi que toute cohésion géographique : l’implantation systématique de colonies juives, plus de 1500 depuis l’arrivée eu pouvoir de Benyamin Netanyahou, a littéralement atomisé la Cisjordanie (Judée-Samarie selon la terminologie israélienne), comme s’en félicitait en juin dernier le ministre de la Défense Israel Katz cité par le Times of Israel. Annonçant en fanfare « une série de nouvelles implantations et la légalisation de plusieurs avant-postes déclarés illégaux par l’ONU », il déclarait tout net que cela « empêchera la création d’un État palestinien ». De son côté, Netanyahou avertissait « les principaux pays européens que toute reconnaissance unilatérale d’un État palestinien pourrait inciter Israël à prendre également des mesures unilatérales, pouvant aller jusqu’à l’annexion de certaines parties de la Cisjordanie ».

Si tout État doit disposer d’une terre, la transformation continue et croissante de la Cisjordanie en peau de léopard dont, défendues par Tsahal et des colons surarmés, toutes les taches ne cessent de s’étendre, rend impossible l’avènement d’un État souverain ou simplement viable. Comme Emmanuel Macron le sait fort bien. Mais lui qui qualifiait de « crime contre l’humanité » la colonisation de l’Algérie ne semble nullement disposé à sommer l’Israël de rendre les terres indûment confisquées au mépris des différents traités conclus.

Force est donc de conclure que sa prestation à l’ONU comme président du premier pays occidental membre du Conseil de sécurité à reconnaître l’existence d’un État palestinien ne sera qu’un coup de pub. Un de plus. Mais après tout, Barack Obama n’avait-il pas promis pendant sa campagne de 2008 que lui élu président des États-Unis, son premier voyage officiel le mènerait en Palestine ? Où il ne trouva jamais le temps de se rendre malgré ses deux mandats successifs à la Maison-Blanche mais cet “oubli” n’a jamais nui à son statut d’icône médiatique.

Camille Galic

Ne laissez pas s’éteindre les voix dissidentes, faites un don au Nouveau Présent!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *