Italie

“Présent !” Un autre visage de l’Italie

Par paresse intellectuelle, trop de Français voient encore dans les Italiens de joyeux drilles ivres de prosecco, poussant la canzonetta à chaque instant et jouant les latin lovers avec les belles étrangères entre deux éclats de rire. C’est oublier que, de Dante à Dino Buzzati en passant par les aristocratiques Leopardi et Manzoni, Gabriele d’Annunzio lançant l’expédition de Fiume ou le sinueux Curzio Malaparte, les gloires de la littérature italienne se signalent par leur sens du tragique, l’exaltation du sacrifice et du courage devant la mort.

Le « rite militant » que nous décrit Tony Fabrizio dans son livre Présent ! (1) en nous détaillant son histoire, sa pratique et sa signification, ne doit donc pas nous étonner. Il s’agit en effet, de rendre leur dignité, de redonner en quelque sorte vie à ceux qui sont tombés au service d’une cause qu’ils croyaient belle et bonne en commémorant leur mort à date fixe. Leur montrant ainsi qu’ils sont toujours « présents » pour leurs frères d’armes et ceux qui, de tout âge, partagent leur idéal.

Inspiré de la Rome antique — et de notre Légion étrangère qui s’est elle-même tant inspirée des soldats-bâtisseurs des Césars —, repris à l’époque fasciste, ce rite n’a rien de morbide. Se déroulant « dans une atmosphère sublime et parfois irréelle, quasi épique », il consiste à défiler dans le plus grand silence en squadra (carré) massif. Puis, à l’appel du nom du disparu, « tous, d’une seule voix, crient un tonitruant “Présent !”, trois fois de suite », et « saluent à la romaine ».

Vu ses origines, rien d’étonnant si ce rite rendu aux nationalistes victimes de leur engagement, tel l’étudiant Carlo Falvella, qu’évoque l’auteur, poignardé par un anarchiste pendant les « années de plomb », est « instrumentalisé et ostracisé par la vulgate “politiquement correcte” » en Italie. Et plus encore en France où serait inconcevable une telle cérémonie en l’honneur de Robert Brasillach, « le jeune poète assassiné » cité par Tony Fabrizio.

D’ailleurs, sont régulièrement interdits, avant d’être parfois, au grand scandale de la bien-pensance, autorisés par le tribunal administratif les défilés organisés chaque année par le Comité du 9-Mai (C9M, fondé notamment par le Groupe Union Droit et le Front national de la Jeunesse — difficile d’imaginer le RNJ actuel se risquant à une telle entreprise) en l’honneur d’un militant de l’Œuvre française : Sébastien Deyzieu qui, poursuivi par des CRS à l’issue d’une manifestation anti-américaine interdite, se réfugia sur le toit d’un immeuble proche, d’où, âgé de 22 ans, il chuta le 7 mai 1994. En 2023, la relative ampleur de ce défilé fit interdire à Paris par le préfet Laurent Nuñez, sur l’ordre du ministre de l’Intérieur Darmanin,toutes les manifestations d’« ultra-droite » prévues ensuite, dépôts de gerbes devant les statues de Jeanne d’Arc et même colloque culturel consacré à l’historien Dominique Venner.

Résultat inattendu de cette persécution : le nombre des participants au défilé est passé de 500 en 2023 à plus de 2000 en 2025…

Claude Lorne

  1. Riche préface d’Alberto Brandi et traduction de Stéphane Bottero. 88 pages, 15 euros, franco de port jusqu’au 31 août. Éditions du Paillon, à commander à https://europa-diffusion.com/fr/

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *