Gaza

L’Egypte et la Jordanie refusent catégoriquement l’asile aux palestiniens de Gaza

Certains s’interrogent sur le fait que l’Egypte, tout comme la Jordanie, refuse catégoriquement l’asile aux centaines de milliers de gazaouis qui se pressent au passage de Rafah qui spear le sud de la Bande de Gaza de l’Egypte et du Sinai. Et pourtant, pour qui connait la lutte féroce menée par l’Egypte de Nasser, Moubarak puis de Ahmad Fatah Sissi contre les Frères Musulmans dont le Hamas est issu, ses raisons sont évidentes, sans compter que tous les pays qui ont jadis reçu des réfugiés palestiniens se sont immanquablement retrouvés avec, outre les femmes et les enfants, des milices armées jusqu’aux dents et déterminées à prendre le contrôle de l’Etat hôte, ce que semble ignorer l’actuel premier ministre Ecossais qui vient très imprudemment de promettre le statut de réfugiés à un grand nombre de gazaouis.

Les Frères musulmans sont à l’origine une organisation islamiste et transnationale née en Égypte en 1928 et dont l’objectif est de libérer le pays des britanniques et de restituer l’islam politique. En 1948 ils s’impliquent dans le conflit israélo-palestinien en créant une branche armée du mouvement en Palestine et le pouvoir égyptien, tant la monarchie du roi Farouk, puis Nasser en passant par Hosni Moubarak se méfie de ce mouvement qui par ses actions caritatives s’assurent le soutien d’une partie grandissante de la population paysanne et des laissés pour compte. Les Frères musulmans sont reconnus comme organisation religieuse en 1984 et présentent un premier candidat à la présidentielle, sans succès. En 2012, après le « printemps égyptien » qui met à bas le régime de Moubarak, ils surfent sur l’islamisme montant et vient alors la consécration avec la victoire de Mohamed Morsi aux présidentielles. Mais ce dernier est renversé en 2014 par le maréchal Abdel Fattah al-Sissi qui prend sa succession. Craignant une instabilité qui mettrait à mal l’organisation politique et économique militaire qu’il met en place pour « tenir » une population de 100 millions d’égyptiens à la démographie galopante vivant sur 1 million de kilomètres carrés, une vague de répression impitoyable s’est abattue sur l’opposition et notamment sur la Confrérie islamiste qualifiée de terroriste et désormais interdite, d’autant plus que l’Égypte est aussi confrontée à une autre menace terroriste : celle de djihadistes salafistes installés dans le désert du Sinaï et qui revendiquent leur affiliation au groupe État Islamique. La priorité de Sissi est claire, lutter par tous les moyens contre toutes les organisations islamistes susceptibles de déstabiliser le pays.

La Jordanie ne veut pas d’un « état dans l’état »

Du coté jordanien, le roi Abdallah n’a pas oublié le danger d’un Yasser Arafat installé après la guerre des Six Jours sur le territoire du royaume hachémite, à Karameh, en Jordanie, où il établit son quartier général. À la fin des années 1960, le Fatah, faction de l’OLP créée par Arafat au Koweït en 1959, installe en Jordanie un véritable « État dans l’État » avec un nombre sans cesse croissant de postes de contrôle tenus par les fédayins au détriment des autorités jordaniennes. Les régions de Jordanie où les Palestiniens rejettent en masse l’autorité du roi Hussein se multiplient. Depuis ces zones palestiniennes, l’OLP effectue des raids et des attaques contre Israël. Simultanément, Yasser Arafat appelle ouvertement au renversement de la monarchie hachémite en arguant du fait que la majorité des habitants de la Jordanie sont Palestiniens. Le roi Hussein de Jordanie cherche alors un compromis et la paix avec Israël. C’est le « plan Rogers » qui prévoit la fin des opérations militaires jordaniennes contre l’État hébreu, et la paix également entre l’Égypte et Israël. Le Fatah et le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) de Georges Habache considèrent ce plan comme une trahison de la cause palestinienne. En septembre 1970, le congrès de l’Union générale des étudiants palestiniens (GUPS) accueille des centaines de militants d’extrême gauche étrangers entrés clandestinement en Jordanie. Georges Habache déclare alors la guerre au Roi Hussein : « Tout ce que nous voulons, c’est combattre Israël et rien d’autre. Le régime jordanien considère que notre seule présence dans le pays représente pour lui un danger […] Pour nous, le roi Hussein est un dirigeant réactionnaire, chef d’un État réactionnaire et donc un obstacle. Et pour réussir notre révolution, nous devons supprimer cet obstacle. » Le 1er septembre 1970, le roi Hussein échappe pour la énième fois à un attentat. Le 6 septembre, le FPLP détourne en même temps quatre avions de ligne : une tentative échoue mais les trois autres avions se posent sur l’ancienne base aérienne Dawson à Zarka. Le 12 septembre 1970, les pirates de l’air du FPLP font exploser les trois avions vides devant la presse internationale, procurant au roi le prétexte d’une offensive destinée à rétablir l’ordre. Le 16 septembre, assuré du soutien des États-Unis et d’Israël, il décrète la loi martiale et ordonne le début de l’offensive. Le 17 septembre 1970, l’armée jordanienne menée par les « Bédouins du Roi » intervient massivement contre les fédayins, l’artillerie bombarde les camps de réfugiés et les bâtiments qui abritent les organisations palestiniennes. Au bout de dix jours de pilonnages, les camps sont rasés et les fédayins pourchassés. Arafat prend alors la fuite avec armes et bagages au Liban, ce dernier étant paralysé par une présence massive de chars syriens envoyés à la frontière par le ministre de la Défense Hafez el Assad pour interdire à l’armée libanaise de fermer sa frontière.

Le 27 septembre 1970, le président égyptien Nasser fait cesser les hostilités entre la Jordanie et l’OLP ce qui n’empêche pas le roi Hussein de poursuivre le « nettoyage » de la Jordanie durant l’été 1971.

Le nombre de victimes palestiniennes de ce mois de « Septembre noir » est estimé à 3500 morts et plus de 110 000 blessés.

Entre 1971 et 1973, l’implantation en masse de combattants palestiniens qui instaure à nouveau « un Etat dans l’Etat » au Liban met en place les conditions de la guerre du Liban qui implose politiquement et militairement, offrant aux palestiniens l’espoir d’en chasser les chrétiens pour installer un Etat palestinien en lieu et place des territoires occupés. La Résistance chrétienne a héroïquement écrit une autre page de l’histoire, mais l’alliance du Hamas et du Hezbollah bâtie cette année sur les décombres des institutions libanaises remet une fois encore sur la sellette la pérennité du Pays du Cèdre.

Sophie Akl-Chedid

(2 commentaires)

  1. Connaissant bien la Syrie, la Jordanie et l’Egypte, je peux témoigner que Sophie Akl-Chedid a tout à fait raison d’affirmer qu’aucun de ce ces pays ne veut des Palestiniens chez eux, tant ceux-ci leur ont causé de souci (euphémisme) par leur activisme depuis 1967. Mais qui a fait des Palestiniens — qu’ils soient musulmans ou chrétiens — des desperados prêts à faire sauter la planète sinon les grandes nations (en commençant par l’URSS comme il tait rappelé récemment ici) qui ont présidé à la création de l’Etat hébreu, puis ont toléré les intolérables empiètements auxquels s’est livré depuis lors Israël, réduisant de plus des deux tiers le territoire palestinien ?
    Au nom des réparations pour l’Holocauste, on a fabriqué des bombes humaines et on s’indigne maintenant qu’elles éclatent. Au risque hélas vérifié que leur fragmentation et leur exemple provoquent de graves dégâts chez nous, où nous accueillons à foison des populations solidaires de la cause palestinienne.

    1. Des desperados prêts à faire sauter la planête ? Alors, ils sont forts ces Palestiniens enfermés depuis des décennies dans un ghetto de 380 km2…

      NB il a échappé un détail, pour une fois, à Sophie : les dirigeants de l’Egypte et de la Jordanie ont déclaré refusé l’exil des Palestiniens de Gaza car  » leur place est en Palestine « . Ce sont plutôt les Sionistes américano-« israeliens » qui ont fait sauter la Serbie, le Koweit, l’irak, la Syrie, la Lybie, … la liste est longue et leurs victimes se comptent par millions.

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