Christ

Dernier dimanche d’Octobre : fête du Christ Roi !

Une religion festive

Dans un pays en grande partie déchristianisé, certains se représentent les catholiques comme des personnes un peu originales, parfois tristes, souvent âgées, et menant des vies assez mornes, faites d’habitudes et de renoncement à la joie de vivre. Or, rien n’est plus faux !

En effet, les vertus théologales nous enseignent la foi, qui permet d’aborder l’existence avec beaucoup de sérénité. Elles nous enseignent l’espérance, qui amène à considérer la vie et la mort avec confiance. Elles nous enseignent la charité, qui nous conduit à aimer notre prochain pour l’amour de Dieu. Ces vertus sont cultivées tout au long de l’année liturgique qui est ponctuée de fêtes solennelles dont la plupart appellent de grandes réjouissances.

Les racines gréco-romaines de notre civilisation ayant été enrichies par le christianisme, les Français continuent de perpétuer les fêtes chrétiennes, même s’ils ont un peu oublié la signification de certaines d’entre elles. Paradoxalement, ce sont les vacances scolaires et certains jours fériés légaux qui rappellent le mieux les fêtes les plus connues : Noël, Pâques, Toussaint, Ascension, Pentecôte, Assomption…

Pourtant, au cours de l’histoire, l’Eglise a institué de nombreuses autres fêtes permettant aux croyants de s’inscrire « personnellement et en communauté dans les pas du Christ et de renouveler leur foi[1]. » Ces introductions successives visaient à répondre à la ferveur populaire lorsque les temps étaient heureux ou, au contraire, à susciter une ferveur nouvelle aux moments difficiles. Et c’est en réaction à une époque troublée que, le 11 décembre 1925, le pape Pie XI promulgua une fête joyeuse, dont il voulut faire le couronnement de l’année liturgique : la fête du Christ-Roi.

Pourquoi célébrer la royauté du Christ ? Qu’est-ce qui le justifiait en 1925 ? Et quels étaient les effets attendus d’une telle célébration ?

Le Christ-Roi

Dans son encyclique Quas primas, le pape examina la royauté de Jésus Christ d’un point de vue métaphorique. Il précisa que le Christ règne sur les intelligences humaines, sur les volontés humaines, et sur les cœurs humains. Mais il insista aussi sur le fait que le Christ était roi au sens propre du terme, dans son humanité.

Ainsi, le pape cita l’Ancien Testament, et notamment le prophète Isaïe : « Il s’assoira sur le trône de David et dominera sur son royaume, pour l’établir et l’affermir et l’équité, maintenant et à jamais[2] ». Pie XI cita également le Nouveau Testament, en particulier Ponce Pilate qui interrogeait Jésus : « Es-tu le roi des Juifs ? Jésus lui répondit : Tu le dis[3] ». Le pape inscrivit aussi la royauté du Christ dans la Tradition de l’Eglise : « Le Concile de Nicée (…) en insérant dans sa formule de foi ou credo les mots cuius regni non erit finis, affirma du même coup la dignité royale du Christ[4] ».

Rappelant le principe théologique de l’union hypostatique des deux natures du Christ, divine et humaine, Pie XI appuya la royauté du Sauveur sur ses pouvoirs législateur, judiciaire et exécutif, et il insista sur l’universalité de cette royauté : « Son empire ne s’étend pas exclusivement aux nations catholiques ni seulement aux chrétiens baptisés, (…) il embrasse également et sans exception tous les hommes, même étrangers à la foi chrétienne, de sorte que l’empire du Christ Jésus, c’est, en stricte vérité, l’universalité du genre humain[5] ».

Une période troublée

L’encyclique pose le postulat selon lequel « jamais ne pourrait luire une ferme espérance de paix durable entre les peuples tant que les individus et les nations refuseraient de reconnaître et de proclamer la souveraineté de Notre Seigneur[6] ». La paix durable entre les peuples pourrait être considérée suivant les enseignements du premier conflit mondial, achevé sept ans auparavant, mais aussi suivant les guerres civiles ou étrangères presque incessantes survenues depuis 1919 en Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Tchécoslovaquie, URSS, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Irlande…

Mais le pape évoqua également le délitement des sociétés causé par l’anticléricalisme et la séparation de l’Eglise et des Etats : « La peste de notre époque, c’est le laïcisme, ainsi qu’on l’appelle, avec ses erreurs et ses entreprises criminelles[7] ». Comment ne pas songer à l’athéisme soviétique né de la Révolution bolchevique et étendu sur toute l’URSS ? Comment ne pas songer aussi à la politique conduite en France par le cartel des gauches et Edouard Herriot qui avait décidé de supprimer l’ambassade de France au Vatican et d’appliquer les lois de séparation dans les départements d’Alsace-Moselle, créant un malaise au Parlement et dans le pays ?

Les politiques antireligieuses furent clairement décrites : « On commença, en effet, par nier la souveraineté du Christ sur toutes les nations ; on refusa à l’Eglise le droit – conséquence du droit même du Christ – d’enseigner le genre humain, de porter des lois, de gouverner les peuples en vue de leur béatitude éternelle. Puis, peu à peu, on assimila la religion du Christ aux fausses religions et, sans la moindre honte, on la plaça au même niveau. On la soumit, ensuite, à l’autorité civile et on la livra pour ainsi dire au bon plaisir des princes et des gouvernants. Certains allèrent jusqu’à vouloir substituer à la religion divine une religion naturelle ou un simple sentiment de religiosité. Il se trouva même des Etats qui crurent pouvoir se passer de Dieu et firent consister leur religion dans l’irreligion et l’oubli conscient et volontaire de Dieu[8] ».

Une fête pour tous

Le pape Pie XI expliqua son souhait d’instaurer une fête du Christ-Roi par la volonté de rétablir la paix : « Jamais ne pourrait luire une ferme espérance de paix durable entre les peuples tant que les individus et les nations refuseraient de reconnaître et de proclamer la souveraineté de Notre Seigneur[9] ». Cette paix entre les peuples était appelée à être complétée par la paix civile : « Si les hommes venaient à reconnaître l’autorité royale du Christ dans leur vie privée et dans leur vie publique, des bienfaits incroyables – une juste liberté, l’ordre et la tranquillité, la concorde et la paix – se répandraient infailliblement sur la société tout entière[10] ». Et plus loin : « Une fête célébrée chaque année chez tous les peuples en l’honneur du Christ-Roi sera souverainement efficace pour incriminer et réparer en quelque manière cette apostasie publique, si désastreuse pour la société, qu’a engendrée le laïcisme[11] ».

La fête du Christ-Roi fut instituée en réaction aux troubles des temps. Sa vocation universelle fut affirmée : « Nous ordonnons qu’elle soit célébrée dans le monde entier, chaque année, le dernier dimanche d’octobre, c’est-à-dire celui qui précède immédiatement la solennité de la Toussaint ». Le pape insista également pour que la fête soit célébrée par tous, et pas seulement par les ecclésiastiques : « En fixant la fête un dimanche, Nous avons voulu que le clergé ne fût pas seul à rendre ses hommages au divin Roi par la célébration du Saint Sacrifice et la récitation de l’Office, mais que le peuple, dégagé de ses occupations habituelles et animé d’une joie sainte, pût donner un témoignage éclatant de son obéissance au Christ comme à son Maître et à son Souverain[12] ».

Enfin, Pie XI insista sur la place de la fête du Christ-Roi dans l’année liturgique, en la décrivant comme l’aboutissement de la gloire de Dieu : « Plus que tout autre, le dernier dimanche d’octobre Nous a paru désigné pour cette solennité ; il clôt à peu près le cycle de l’année liturgique ; de la sorte, les mystères de la vie de Jésus-Christ commémorés au cours de l’année trouveront dans la solennité du Christ-Roi comme leur achèvement et leur couronnement et, avant de célébrer la gloire de tous les Saints, la Liturgie proclamera et exaltera la gloire de Celui qui triomphe, en tous les Saints et tous les Elus[13] ».

Actualité de la fête du Christ-Roi

Pourquoi célébrer le Christ-Roi aujourd’hui ? Peut-être pour nous pénétrer des vérités de la foi et nous élever aux joies d’une vie intérieure riche, tranquille, et constante. Peut-être aussi, en ces temps difficiles que nous vivons, pour nous souvenir du baptême de la France, des racines chrétiennes de l’Europe et des innombrables trésors que le génie du christianisme a apportés à notre société. Peut-être, enfin, comme l’écrivit le pape Pie XI, parce que « du jour où l’ensemble des fidèles comprendront qu’il leur faut combattre, vaillamment et sans relâche, sous les étendards du Christ-Roi, le feu de l’apostolat enflammera les cœurs, tous travailleront à réconcilier avec leur Seigneur les âmes qui l’ignorent ou qui l’ont abandonné, tous s’efforceront de maintenir inviolés ses droits[14] ».

André Murawski 

[1] https://www.lejourduseigneur.com/fetes-chretiennes#:~:text=Quelle%20est%20la%20finalit%C3%A9%20des,et%20de%20renouveler%20leur%20foi.

[2] Isaïe, IX 6-7

[3] Luc, XXIII 3

[4] Pie XI, Quas primas, 11 décembre 1925

[5] Ibid

[6] Ibid

[7] Ibid

[8] Ibid

[9] Ibid

[10] Ibid

[11] Ibid

[12] Ibid

[13] Ibid

[14] Ibid

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