Il n’avait pas fallu longtemps pour s’aviser que, présenté comme « le Mozart de la finance », Emmanuel Macron était en réalité le Beethoven des pertes et des déficits budgétaires — celui de l’année 2023 s’est élevé à 173,3 milliards d’euros, un record historique avoué le 24 janvier par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Mais le chef de l’État passait aussi pour un communicant hors pair. Comment admettre que, lors du « grand débat sur l’agriculture » devant précéder le Salon du même nom qui s’ouvrait le 24 février, l’Élysée ait invité, outre les syndicats agricoles et les gros distributeurs, les activistes des Soulèvements de la Terre ?
Mouvement si violent en paroles mais surtout en actes, à Sainte-Soline notamment (47 gendarmes blessés et quantité de biens agricoles dévastés fin mars 2023), que le ministre de l’Intérieur avait prononcé sa dissolution, d’ailleurs refusée par le Conseil d’État sous prétexte qu’il s’agissait non d’un mouvement mais d’un collectif, et que les faits reprochés n’avaient pas été totalement établis.
Cette incompréhensible (ou trop logique) décision des « Sages » avait déjà scandalisé le monde paysan sans cesse harcelé et calomnié par les militants des Soulèvement de la Terre, qui ne voit en revanche inconvénient à l’envahissement du marché français par des produits agricoles d’importation — d’Ukraine notamment, qui nous fournit 30% des poulets consommés — et pour la plupart dopés aux produits chimiques ou bourrés de pesticides interdits chez nous. Vécue comme une provocation, l’invitation lancée au grand débat ne pouvait exciter les esprits les plus raisonnables. Certes, l’invitation a été annulée et, du coup, le grand débat décommandé la veille en catastrophe mais c’était trop tard. « L’Élysée a tenté de me faire le coup de l’erreur du stagiaire… Je n’ai pas cinq ans ! », déplorait Arnaud Rousseau, le pourtant très régimiste président de la FNSEA qui dénonçait une démarche « d’un cynisme intolérable, prouvant que l’exécutif n’a rien compris aux problématiques agricoles ».
Face aux agriculteurs présents, Macron a bien pu protester de son innocence, affirmant qu’il n’était pour rien dans l’incroyable faux-pas commis par des sous-fifres et en avait tout ignoré, il a été chahuté comme jamais aucun président ne l’avait été en telle circonstance, obligeant les CRS à sévir durement contre les perturbateurs — alors que, le lendemain, Jordan Bardella devait être acclamé. Sous la tempête, l’époux de Brigitte a tenté de faire bonne figure à l’inauguration, d’ailleurs très retardée, du Salon, et même (sous l’effet de quels excitants ?) tenu douze heures durant face aux « bonnets jaunes », mais le mal n’en n’a pas moins été fait. Et des questions se posent.
Qui tient l’Élysée, qui y prend des initiatives ?
Selon Le Point, ce sont « les conseillers directement chargés du dossier : le conseiller agriculture du président, Matthias Ginet, et son supérieur direct, chef du “Pôle écologie, agriculture, énergie, transports, logement” de l’Élysée, Benoît Faraco » qui avaient envoyé un carton aux Soulèvements de la Terre, ainsi d’ailleurs qu’à d’autres groupes verts-rouges telle l’imbécile « Dernière Rénovation (devenu Riposte alimentaire et qui s’est récemment illustré par des jets de soupe sur les tableaux des musées », au Louvre notamment. Mais pourquoi Macron avait-il choisi (et surtout conservé dans une période aussi électrique) de tels conseillers à l’Agriculture, sortis du pire sérail écolo et si notoirement opposés au monde rural ? Et à quoi sert Alexis Kohler, tout puissant secrétaire général de la Présidence depuis 2017 et donc deus ex machina élyséenne ?
Le chef de l’État et son équipe auraient voulu apporter la preuve qu’ils ne connaissent rien à la paysannerie et ont le plus grand mépris pour elle qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement.
La Rédaction