indépendance

L’Île de Ré en exemple

Quitte à être souverainiste, autant l’être à fond ! La France n’arrive pas à se débarrasser de ces liens prétendument inextricables avec cette Europe esclave du mondialisme ? Gerbert Rambaud, avec l’humour qu’on lui connaît, a décidé de lui donner une leçon en mettant en scène l’exemple d’un tout petit « pays », en l’occurrence l’Île de Ré.

L’auteur connaît parfaitement l’île en question, ses habitants, leurs mœurs, sa faune, sa flore, ses rythmes divers au gré des saisons et les liens entre les diverses couches de la population, locale ou saisonnière. Par une coquetterie de l’Histoire dont, par hasard ­— ou par un clin d’œil de la Providence ? ­— un avocat parisien dont les racines s’avèrent rétaises retrouve le secret, la possibilité est offerte à ce morceau de terre, situé non loin de la côte française mais dans les flots de l’Atlantique, de se déclarer indépendante. Le nouveau « souverain », comme les Rétais eux-mêmes, ne s’y décident ni sur un coup de tête, ni à la légère, mais pèsent mûrement leur décision. Le plus étonnant est qu’au fil du récit, le lecteur se laisse prendre et finit par y croire. Car la valeur des arguments géopolitiques qui sous-tendent cette démonstration finit par impressionner. Gerbert Rambaud montre bien, par exemple, que les destinées de l’Europe, désormais, ne sont pas aux mains des politiques, supposés tout de même être plus ou moins élus, mais bien dans celles de fonctionnaires sans aucune légitimité. Les problèmes causés par une immigration incontrôlée, accompagnée de la menace de la charia, la nouveauté des « influençeurs » et de leur nombreux suiveurs (ce qui, dans ce cas précis, pourra jouer pour la bonne cause), ou l’influence débonnaire de nos ancêtres, nous regardant œuvrer de l’endroit où ils se trouvent, des thèmes que l’on peut considérer comme « sérieux », donc, se mêlent à d’autres qui plaisent tout autant : ode au trictrac (une des passions de l’auteur), au thé (bienvenue) ou au vin, avec des accents dignes de Mr Pickwick : « Rien de tel qu’un grand vin pour réparer une âme en peine. »

L’auteur aime l’Histoire. On retrouve dans son récit Napoléon (et sa « sagesse », dont pour notre part nous doutons), Mers-el-Kebir, le suaire de Turin, Henri Béraud (pas toujours silhouetté de façon sympathique, autant prévenir nos lecteurs béraldiens). S’il existe-t-il une cérémonie religieuse contre les cas de possession, y en a-t-il une pour les cas « d’empêchement de rejoindre le Ciel » ? Après tout, le romancier est seul maître à bord et peut tout imaginer.

Gerbert Rambaud nous offre une jolie lecture de vacances, légère, enlevée et pleine d’enseignements malicieux.

Anne Le Pape

• Gerbert Rambaud, Et si l’Île de Ré devenait indépendante ? Editions du Lizay.

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