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Le coup d’œil de Philippe Randa : d’une solidarité l’autre, à vot’bon cœur, m’sieur-dames !

Il fut un temps où un garçon hésitait à avouer que sa couleur préférée était le… rose ! Pour cause, c’était la couleur des filles et le bleu celui de leur amoureux. Aimer le rose était suspect de « mœurs particulières », comme on qualifiait alors, dans cet autre temps, ces autres mœurs.

Avec la campagne « tout en rose » de lutte contre le cancer du sein, en ce mois d’octobre 2025, arborer cette couleur ne sous-entend donc aucune allusion sexuelle et permet à tout homme d’arborer vêtement ou simple ruban – voir, plus discrètement, string rose si ça lui chante –sans risque de faire sourire homophobes ou gros beaufs : seuls quelques intégristes religieux extra-européens pourraient mal interpréter leur élan de générosité envers une si noble cause ; enfin, peut-être, Allah savoir !

Tout, à défaut de tous, en rose, donc : en ce début d’automne et pour 31 jours espérés particulièrement sonnants et trébuchants, « rubans, affiches, campagnes publicitaires : le pays entier se met au diapason  », souligne Thomas Joly sur son blog, qui, voix discordante dans la bien-pensance générale sur le sujet, s’emporte néanmoins contre « l’élan d’émotion (derrière lequel) se cache une hypocrisie révoltante (soit) l’appel aux dons » et d’expliquer : « Enfin, est-ce vraiment aux Français – pressurés comme jamais par l’impôt, étranglés par l’inflation – de financer la lutte contre le cancer du sein ? Est-ce à eux de sortir leur portefeuille quand ils contribuent déjà à l’un des systèmes fiscaux les plus confiscatoires du monde ? » et pointant du doigts les générosités qu’il juge scandaleuses de notre pays pour toute la misère du monde : « Pour financer, par exemple, la construction d’infrastructures en Afrique de l’Ouest ou encore des projets de coopération agricole au Sahel qui disparaissent dans la corruption endémique. En revanche, quand il s’agit de soigner une Française atteinte d’un cancer, on nous explique qu’il faut organiser des loteries, des courses solidaires et des quêtes de rue. »

Laissons au Président du Parti de la France le soin de dénoncer cet aspect « d’octobre rose » et contentons-nous de souligner que le système médical n’est pas la première (et ne sera sans doute pas la dernière) victime d’une politique plus générale de désengagement systématique de l’État français, malgré ses obligations de répondre à ses fonctions régaliennes, soit « les fonctions dont la responsabilité doit normalement être prise par l’État et qu’il ne doit pas déléguer à des sociétés privées », et notamment celle de lever l’impôt et d’assurer la gestion des finances publiques.

Plutôt donc que de lever un impôt supplémentaire qui s’ajouteraient à tant et tant d’autres, il encourage les initiatives privées telles que celle rappelant la gravité de cette maladie du cancer du sein – comme si on ne s’en doutait pas – sensibiliser les femmes à l’importance du dépistage – comme si ce n’était pas de l’évidente responsabilité, sinon obligation, de leur médecin traitant – et, bien entendu, tendre la sébile, comme il se doit…

Qu’on se rappelle de la très médiatisée campagne de l’association des Restos du cœur, créée par le comique Michel Colucci en 1985 : elle alerta l’opinion publique sur nos malheureux compatriotes aux repas quotidiens des plus incertains. L’initiative était heureuse, certes, puisqu’aucun parti politique n’avait songé à le faire auparavant. Ou n’avait été entendu, peut-être… Mais un scandale en appelant un autre, n’est-ce pas l’attitude du gouvernement français d’alors qui aurait dû, humilié par cette initiative qui dénonçait sa carence dans la lutte contre la pauvreté, réagir aussitôt pour palier à ce scandale social ?

Tout au contraire, lui et les gouvernements qui lui succédèrent à la tête du pays, applaudirent et encouragèrent ces bénévoles de « faire le taf » et les Français de remplir les caddies de l’association.

Que les Restos du cœur continuer d’exister 40 ans plus tard est une honte nationale, n’en déplaise !

Une campagne en chassant une autre, de la Journée mondiale de lutte contre le Sida le 1er décembre 2024 à la Journée mondiale de sensibilisation à la maltraitance des personnes âgées le 15 juin, en passant par la Journée internationale de la charité 2025 (c’était le 5 septembre dernier, vous l’avez manqué ? Allez à la case prison, sans passer par la case départ et sans oublier de filer 100 balles), la générosité des Français sans cesse mise à contribution perdurera-t-elle ad vitam aeternam ?

Dans un de ses sketchs célèbres, le même Coluche se moquant d’un Belge devant un distributeur de boisson sur l’autoroute lui faisait dire : « Ben, dites donc, tant que j’gagne je joue. »

Alors, et vous ? Une autre partie ?

Philippe Randa

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