Sans doute un peu sur le modèle de la Société des Lecteurs de Céline, vient de se créer une Société des Lecteurs de Barrès. Il était temps ! L’auteur de La colline inspirée était en effet à ce jour le dernier grand oublié (ou plus exactement négligé) du vaste mouvement de redécouverte et de revalorisation des écrivains enracinés.
La biographie qu’Emmanuel Godo vient de consacrer à l’écrivain lorrain, qu’il présente comme « le grand inconnu », a constitué une sorte d’électrochoc, le premier signal d’un retour en grâce de celui qui domina les lettres françaises et la politique, au tournant du XXe siècle. Mais citons aussi l’ouvrage de Jean-Marie Cuny, Le Lorrain Barrès, paru également cette année, qu’il convient d’ajouter à notre bibliothèque barrésienne.
Au sein de cette société de l’amitié Barrésienne réconfortée, on trouve le professeur Olivier Dard, l’académicien Jean-Luc Marion et l’historien François Broche, notamment, avec Frédéric Aymard aux commandes opérationnelles, que l’on savait maurrassien, mais qui se révèle donc aussi sensible à la musique des mots de Barrès.
Le souvenir du Barrès politique, l’importance de ses romans engagés (en particulier la trilogie du « roman de l’énergie nationale » et celle des « bastions de l’Est ») s’estompaient, mais il y a en fait, chez Barrès, une grande modernité, par l’éclectisme de ses centres d’intérêt, par son appétence pour les pays du « mare nostrum » (Espagne, Italie, pays du Levant…), par l’acuité de son regard sur l’Allemagne, par sa capacité à se situer dans son temps tout en ne niant rien des traditions françaises, et tout simplement aussi par la limpidité d’une écriture qui n’a pas pris une ride.
Plus que Maurras, selon moi, et comme Maupassant ou Morand, Barrès fait partie de ces écrivains que l’on peut relire sans trouver une seconde que l’écriture est datée. Pourtant l’œuvre de Barrès a cent ans et plus.
Un grand merci à cette jeune Société des Lecteurs de Maurice Barrès qui vient offrir enfin à tous ses fans un instrument de promotion de celui que l’on appelait, en son temps « le prince de la jeunesse ». Ses fans, c’est, pour faire simple, la génération qui a découvert ses auteurs fétiches dans les pages des « Que lire ? » de Mabire, des « Qui suis-je ? » de chez Pardès, ou de la revue Livr’arbitres.
Agathon
Société des Lecteurs de Maurice Barrès, 60 rue de Fontenay 92350 Le Plessis Robinson.
Emmanuel Godo, Maurice Barrès, le grand inconnu,1862-1923, Paris, Éditions Tallandier,
Jean-Marie Cuny, Le Lorrain Barrès, Nancy, Éditions du Verbe Haut
Par ailleurs, nos amis de la revue littéraire Livr’arbitres consacre une large part de leur nouveau numéro à Maurice Barrès :