Nimier

Les lectures de Mathilde Cruz : Gobineau, Jacques Cartier, Nimier… le temps des biographies (Partie I)

Nous étions tous un peu nostalgiques de la collection « Qui suis-je ? », cette extraordinaire série de 131 biographies consacrées à des personnalités, généralement remarquables, voire admirables (à quelques exception près, genre Staline, Lénine ou Pol Pot), qui avait cessé de paraitre en 2022.

Or il se trouve qu’en cette fin d’année neigeuse et ensoleillée tout à la fois, une rafale de biographies, dans le même esprit que les « Qui suis-je ? » semble prendre le relais.

La « Bio Collection » a été lancée à la rentrée, par les éditeurs Synthèse et Déterna. Les premiers titres sont des rééditions actualisées de biographies parues il y a plusieurs années : un « Henri Béraud », déjà décrit et commenté sur ce site, un « Jacques Cartier » et un « comte de Gobineau ». Outre la pagination nettement augmentée, avec le si précieux index des noms cités, trop souvent « oublié » par les éditeurs de biographies, ces synthèses permettent de populariser de grandes figures, que tout le monde connait de nom, au moins, mais qui méritent de trouver un nouveau public de lecteurs. Les temps ont changé, récemment. Il y a un retour d’admiration pour les grandes figures de l’Histoire de France, les héros et les saints. Le déchainement du wokisme fou et de l’islamisme dérangé a fortement contribué à ce regain d’intérêt.

Victime d’une sorte de conspiration

Gobineau, par exemple, a été victime d’une sorte de conspiration hostile, à cause sans doute de son Essai sur l’inégalité des races humaines, une étude parue il y a presque deux siècles. Or Gobineau c’est à la fois bien autre chose et beaucoup plus que cela : des romans, des essais politiques, des analyses littéraires etc. Même son travail de généalogiste (Histoire d’Ottar Jarl, pirate norvégien, conquérant du pays de Bray en Normandie, et de sa descendance) constitue lui aussi un étonnant travail, et cet ouvrage sur Ottar Jarl et ses descendants est aujourd’hui très recherché par les amateurs de littérature du XIXe siècle.

Tout cela, c’est David Gattegno, l’un des directeurs de la « Bio Collection » qui me l’a appris. J’avais acquis auprès d’une très cultivée rédactrice de Présent (du temps où ce journal paraissait en format quotidien papier), les deux tomes des œuvres de Gobineau parus à la Pléïade, mais j’avoue que je ne les avais pas ouverts, un peu rebuté par le style, et surtout par cette fausse réputation d’avoir été l’homme d’un seul livre, volontiers qualifié de « sulfureux ».

David Gattegno a su me donner envie de me plonger dans cette œuvre, à commencer par son chef d’œuvre absolu, les Nouvelles asiatiques. Il était temps que je fasse mieux connaissance avec l’homme, et de ce point de vue, la réédition du Gobineau de Jacques Bressler, dans la Bio-Collection (il porte le n°4) tombe parfaitement à pic. Tout savoir de ce « fils de roi » en 172 pages, en fait un bon outil de travail. J’ai du mal, personnellement, à apprécier un écrivain, si je n’apprécie pas aussi l’homme (ou la femme, bien entendu). Je vous en dirai sans doute plus sur Gobineau quand j’aurai fini de découvrir sa vie par le biais de cette biographie.

Découvrir et explorer le Canada

L’autre récente réédition dans la « Bio Collection » traite d’un personnage très différent : Jacques Cartier (1491-1557). Ce marin que nous connaissons tous plus ou moins, n’est autre que le Français, – un malouin -, qui découvrit et explora le Canada, pour le compte de François 1er.

Telle une victime de la dérive des continents, Le Canada semble s’éloigner actuellement de nos centres d’intérêt, du fait de trajectoires politiques et intellectuelles divergentes. C’est bien dommage. Mais en tout état de cause l’aventure canadienne a suscité tant de courage, tant de dévouements, tant d’altruisme, tant de curiosité chez des explorateurs, soldats, prêtres ou scientifiques français, en un demi-millénaire, qu’il en reste forcément quelque chose, quelque chose qui mérite de ne pas sombrer dans l’oubli … ou pire, dans le wokisme !

Jacques Cartier est peut-être le plus important de ces géants français qui firent du Canada un grand pays, et qui contribuèrent simultanément au génie et la gloire de la France. Un demi-millénaire de retombées positives, qui dit mieux ?

La bio de Jacques Cartier est écrite par un talentueux et éclectique journaliste québécois, Rémi Tremblais. L’ouvrage est très abondamment illustré. C’est une passionnante synthèse, que tout Français partant au Canada devrait glisser dans sa valise. Pour ne rien oublier, pour tout comprendre.

La Bio Collection nous annonce la parution prochaine de biographies inédites : un Parmentier, un Pinochet, un Charlemagne etc. Au rythme d’une biographie par mois, qui est l’objectif des deux éditeurs associés dans cette aventure, nous allons pouvoir tous nous constituer ou compléter la plus belle galerie de portraits que l’on puisse imaginer,

(à suivre)

Madeleine Cruz

Le comte de Gobineau, « fils de roi », par Jacques Bressler, 175 pages, Synthèse & Déterna éditeurs, La « Bio Collection », 2025, 20€.

Jacques Cartier, le découvreur du Canada, par Rémi Tremblay, 150 pages, Synthèse & Déterna éditeurs, La « Bio Collection », 2025, 20€.

Nimier, par Thierry Bouclier, Lif éditeur, collection « Qui suis-je ? », 126 pages, 15€.

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