crop doctor with stethoscope preparing for surgery in hospital

Mort d’une infirmière à Reims : malchance ou logique asilaire hypocrite ? – Le coup d’œil de Philippe Randa

Le drame de l’infirmière tuée au CHU de Reims lundi 21 mai dernier, fait – à juste titre – la Une des médias (jusqu’à quand ?) et émeut autant nombre de personnalités politiques que de simples citoyens, horrifiés par ce énième fait-divers criminel. D’autant plus terrible que, « faute à pas d’chance », la malheureuse était sans doute au mauvais endroit au mauvais moment ; elle n’était pas visée précisément par un assassin aux « antécédents psychiatriques ».

Le quotidien Sud Ouest nous explique ainsi que « selon les premiers éléments de l’enquête, l’agresseur, un homme de 59 ans sous curatelle, souffrait de troubles psychiatriques sévères et s’était déjà montré violent à plusieurs reprises. Même s’il n’est pas possible à ce stade de déterminer quel rôle précis a joué sa pathologie – dont on ignore d’ailleurs la nature –, des questions se posent déjà sur le suivi psychiatrique dont il faisait l’objet. “Le patient ne prenait pas son traitement depuis plus d’un an”, a rapporté une source syndicale locale qui a requis l’anonymat. »

Et Force ouvrière Santé rappelle, de son côté, que ce meurtre « repose immédiatement la question de la situation catastrophique de la prise en charge des malades mentaux dans nos établissements psychiatriques. »

Pour ma part, il me rappelle mon premier article – « Asiles : la logique hypocrite ! » – dans le premier numéro de Flash infos magazine, paru le… 2 novembre 2008 ! Selon un adage personnel que ce sont parfois dans les « vieux écrits » qu’on peut trouver les meilleures explications, en voici donc un extrait explicite : «Dans le même temps où pleuvent les interdictions, on continue de relâcher dans la nature nombre de dingues dont il suffit de croiser le chemin pour avoir à le regretter amèrement. Si ce n’est définitivement.

Qui sait qu’on a supprimé (au moins) depuis dix ans, en France, plus de 40 % des lits d’hospitalisation complète en psychiatrie ? »

C’était en 2008, donc… Et rappelons « qu’entre 2003 et 2019, le nombre total de lits en psychiatrie a diminué de 4 600. Après s’être stabilisé autour de 57 000 lits de 2007 à 2016, il recule lentement depuis 2016 » et que selon www.santementale.fr : « En 2021, le nombre de lits de psychiatrie continue de reculer (-0,9 %). »

« Asiles : la logique hypocrite ! » (suite) :  « Dans les années 70 du siècle dernier, nombre de psychiatres, très modérément à droite de l’échiquier politique, ont milité dans une double perspective de fermeture de l’hôpital psychiatrique et de développement des structures alternatives extérieures. Beaucoup étaient membres du Syndicat de la psychiatrie – dont les fondements étaient semblables à ceux du Syndicat de la magistrature – qui se transformera en 1986 en Union syndicale de la psychiatrie, mais toujours dans les mêmes perspectives de lutte contre ce qu’ils appelaient la logique asilaire.

L’un de ces psys, Paul Machto, constatera deux décennies plus tard : “Autant on a pu se battre pour des fermetures de lits et pour le développement de l’extra-hospitalier, autant on peut dire que la question du dépassement de l’hôpital psychiatrique a été totalement récupérée, ou détournée, par les différents gouvernements qui se sont succédé, dans une perspective purement gestionnaire, comptable, et également par certains psychiatres qui ont prôné l’ouverture de services de psychiatrie en hôpital général, mais en ignorant totalement ce qu’il en est de la logique asilaire. La fermeture des lits telle qu’elle a été faite est catastrophique (« Quel avenir pour la psychiatrie ?», www.combatenligne.fr).

Catastrophique pour la sécurité de tout à chacun, sans doute… mais pour les finances publiques, c’était au contraire tout bénéfice. S’il fut un temps où “Labourage et pâturage” étaient les deux mamelles de la France, “rackets et cynisme” semblent être celles de notre si hypocrite époque. »

Quant à l’infirmière de Reims, aux victimes précédentes et à celles qui suivront : Requiescat in pace, n’est-ce pas ?

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