Décédée le 5 août à l’âgée 94 ans, Hélène Carrère d’Encausse aura exercé avec autorité et jusqu’à son dernier jour la fonction de secrétaire perpétuel — donc PDG — de l’Académie française. Perpétuel au masculin comme elle se voulait commandeur (sans e) des Arts et Lettres ou docteur (toujours sans e) honoris causa de multiples universités : à juste titre, cette Parisienne née d’un père géorgien, Georges Zourabichvili, et d’une mère descendante de barons baltes, et dont la langue maternelle était le russe, jugeait absurde et attentatoire au génie de notre langue le prurit féministe défigurant substantifs et pronoms.
Spécialiste de l’Asie centrale et historienne déjà renommée, elle avait accédé à une notoriété mondiale en 1978 avec son livre L’Empire éclaté, dont le succès reposa d’ailleurs sur une analyse erronée : l’Empire éclata bien mais pas, comme elle l’avait prédit, à cause de l’islamisme rongeant les républiques musulmanes soumises à son joug. C’est le totalitarisme obtus de l’URSS, sa corruption endémique, son caporalisme généralisé et surtout sa paupérisation suite à la si dure et vite impopulaire guerre d’Afghanistan où elle s’embourba et perdit tant d’hommes de 1979 à 1989, qui provoquèrent son implosion et les premières colonies à se rebeller furent les anciens États baltes. Tandis que l’Azerbaïdjan ou le Kazakhstan restaient fidèles. Mais en 1990, l’année où la Russie rouge commentait à se déliter, Hélène Carrère d’Encausse n’en fut pas moins élue sous la Coupole. Ce qui accrut son renom et la rendit très recherchée par les politiques.
Courtisée par Jack Lang, protégée de Maurice Bardèche
En 1992, elle accepta ainsi la présidence du Comité national pour le « Oui à Maastricht » créé par par Jack Lang, puis le poste de conseillère spéciale auprès de Jacques Attali propulsé par Mitterrand, qui ne savait comment s’en débarrasser, président de la Banque européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD, dont l’histoire depuis la construction de son mirifique siège de marbre, fut une suite de scandales financiers). Créatrice la même année avec le Togolais Kofi Yamgnane (ancien maire de Saint-Coulitz et couronné par Armor Magazine comme « Breton de l’année » — Breton d’après la marée noire, rctifièrent les mauvaises langues) de la Fondation pour l’intégration républicaine, l’académicienne fut nommée en 2004 présidente du conseil scientifique de l’Observatoire des statistiques de l’immigration et de l’intégration. Où elle sema la consternation en déclarant après les émeutes du ramadan 2005 et, circonstance aggravante, sur une chaîne de télévision russe car elle était alors au mieux avec Vladimir Poutine dont elle devait se désolidariser courant 2022 : « Tout le monde s’étonne : pourquoi les enfants africains sont dans la rue et pas à l’école ? Pourquoi leurs parents ne peuvent pas acheter un appartement ? C’est clair, pourquoi : beaucoup de ces Africains, je vous le dis, sont polygames. Dans un appartement, il y a trois ou quatre femmes et vingt-cinq enfants. Ils sont tellement bondés que ce ne sont plus des appartements ! On comprend pourquoi ces enfants courent dans les rues. »
Quai Conti, elle avait été accueillie par Michel Déon. Se souvint-elle à cette occasion que, apatride et jeune étudiante miséreuse depuis la disparition en 1944 de son père sans doute massacré à la Libération en expiation de son emploi comme traducteur trilingue dans un service allemand, elle avait été paternellement accueillie dans son foyer par le normalien Maurice Bardèche, le beau-frère d’un autre réprouvé, Robert Brasillach (1) ? Si, devenue Immortelle, Hélène Zourabishvili se gardait d’évoquer cet épisode relaté par Bardèche dans ses Souvenirs (éd. Buchet-Chastel, 1993), du moins ne se joignit-elle jamais à la meute acharnée contre son ancien protecteur, auquel ses livres Nuremberg ou la Terre promise et Nuremberg II ou les Faux-Monnayeurs (1948 puis 1950, éd. des Sept Couleurs) valurent le titre de « premier des négationnistes ».
Claude Lorne
- Bardèche et Brasillach cosignèrent en 1935 une Histoire du Cinéma et, en 1939, une Histoire de la Guerre d’Espagne dont une magnifique réédition, enrichie d’une préface de l’universitaire Cécile Degas, d’une somptueuse iconographie due à David Gattegno, d’un appareil de notes et d’un bien pratique index (560 pages, 35 €) vient de paraître à l’initiative des Amis de Robert Brasillach. Tous renseignements auprès de M. Delcroix (arbfrance@orange.fr). Lire aussi le bel article de Madeleine Cruz https://nouveaupresent.fr/2023/07/18/les-lectures-de-madeleine-cruz-la-guerre-despagne-comme-si-vous-y-etiez/
Sur les causes de la chute de l’URSS, j’aurais ajouté Tchernobyl. Les Soviétiques savaient par la rumeur, par les mesures prises, qu’il s’était passé quelque chose, mais seule l’écoute (interdite) des médias occidentaux leur a permis d’avoir une info précise, de prendre conscience de la gravité de ce qui s’était passé. Tout le monde – y compris les membres du PC – cherchaient vers l’ouest des infos.
Pour moi deux personnalités sont à l’origine de la chute de l’URSS : jean Paul II d’une part qui connaissait l’idéologie communiste et qui a su la combattre et de quelle manière. Ronald Reagan ensuite, qui a rompu radicalement avec ses prédécesseurs et la politique de la coexistence pacifique si chère à Kissinger qui en réalité ne faisait que renforcer l’URSS. Reagan a osé et comme l’URSS ne tenait que par la faiblesse de l’Occident à son égard elle a rapidement sombré.
Il est de bon ton, aujourd’hui, en France, de critiquer R.Reagan et M.Thatcher pour leur « ultra-libéralisme » , étiquette mise à la mode par les communistes, mais qui est employée à leur encontre jusqu’au sein de la droite nationale. Elle est collée à tous ceux qui tentent de préserver la liberté dans un monde de plus en plus socialisé, étatisé, et où la liberté d’expression se réduit constamment, le wokisme constituant, de ce point de vue, une spectaculaire étape de plus.
Si on se replonge dans les années 1980, la moitié de l’Europe était communiste, le communisme avait spectaculairement progressé en Asie, en Amérique latine et en Afrique. C’est « le monde libre » qui était assiégé. Reagan, Thatcher, Jean-Paul II – et aussi Lech Walesa – ont puissamment contribué au recul du communisme et à l’accroissement des libertés .
Aujourd’hui nous avons vraiment besoin d’un retour des libertés, attaquées par d’autres : l’islamisme, le wokisme (et avant lui, les « lois mémorielles ») etc.
Merci pour vos précisions sur Hélène Carrère d’Encausse.
Après son décès, Emmanuel Macron a salué la mémoire d’une « historienne majeure », « première femme Secrétaire perpétuel de l’Académie française », et dont le « legs, comme elle, est immortel » et annoncé qu’un hommage national dans la cour d’honneur des Invalides lui serait réservé en sa présence « avant la fin de l’été ». Pourquoi pas puisqu’un tel hommage avait été réservé à l’acteur Jean-Paul Belmondo ?
Mais espérons que Macron n’en profitera pas pour déclamer une ode à l’immigration qui enrichit tellement la France. Issue de membres des noblesses balte et géorgienne, européenne, chrétienne et imprégnée de culture française, l’académicienne n’était pas plus « immigrée » que le général de Mac-Mahon, d’origine irlandaise mais devenu président de la République française.
[…] C’est ce jeudi 28 que les Immortels doivent élire un secrétaire perpétuel, autrement dit recteur… ou PDG, de l’Académie française pour succéder à l’historienne d’origine géorgienne Hélène Carrère d’Encausse, décédée en août (https://nouveaupresent.fr/2023/08/06/lumiere-et-ombres-dhelene-carrere-dencausse/ […]