Ukraine, Covid, de Gaulle, RN, Proche-Orient : sur certaines questions le « camp national » offre une assez large diversité d’opinions. A propos du Proche-Orient, Françoise Monestier rappelle dans nos colonnes qu’il en était déjà ainsi il y a un demi-siècle, quand Bardèche et Brigneau soutenaient des positions radicalement opposées. A l’époque, les intervenants avaient à cœur de faire primer les facteurs d’unité, car leurs rangs étaient plutôt clairsemés.
Le Nouveau Présent ouvre aux contributeurs qui le souhaitent, une nouvelle rubrique, « Libres controverses », dans un esprit de liberté d’expression, mais néanmoins dans le respect des règles de convivialité.
En septembre dernier, dans les pages de Valeurs actuelles, un article à vocation historique avait fait une allusion à l’exécution sans jugement, et sur consignes (ambiguës) du futur maréchal Leclerc de Hautecloque, de douze jeunes Français, membres de la division Charlemagne, faits prisonniers par ses hommes. Un lecteur avait relevé que cet acte n’était pas un fait de guerre, mais lui semblait plutôt un crime de guerre, précisant d’ailleurs que cette division SS « n’avait combattu que sur le front de l’Est », et n’avait donc pas de sang français sur les mains. Aussitôt un autre lecteur a réagi avec violence, évoquant un courrier de lecteur « odieux », se présentant, selon lui, comme « une vague réhabilitation de salauds » (Vincent Robert dans Valeurs actuelles du 14 septembre 2023).
Leclerc avait exprimé à ces douze jeunes prisonniers son dégoût de voir des Français sous un uniforme étranger. Mais l’un de ces douze hommes aurait réagi avec beaucoup de courage, et beaucoup d’inconscience, en lui répondant que lui aussi portait un uniforme étranger, en l’occurrence l’uniforme américain.
Et c’est à la suite de cette altercation que Leclerc, issu d’une famille royaliste et qui avait lui-même été un lecteur assidu de L’Action française jusqu’à l’Occupation, avait donné l’ordre de « se débarrasser » de ces prisonniers, ce qui constituait une consigne implicite de les liquider.
« Question de civilisation »
Depuis lors le site de dialogue de Valeurs actuelles croûle littéralement sous les messages polémiques ou plus nuancés, relatifs à ce sujet : le 21 septembre, un lecteur rappelait par exemple, à juste titre, me semble-t-il : « il reste un droit à défendre dans notre civilisation : on ne fusille pas les prisonniers, même ceux issus d’une guerre civile, on les remet si possible à la justice de leur pays qui, vu leur jeune âge, les aurait peut-être laissé vivre. Simple question de pitié et de civilisation qui nous place au-dessus des totalitarismes ». (Henri Peter, Valeurs actuelles, 21 septembre 2023).
C’est un fait que peu de soldats de la division Charlemagne ont été fusillés. La plupart ont été condamnés à des peines de prison relativement courtes et certains ont même trouvé par la suite des morts héroïques, sous l’uniforme français, cette fois, en Indochine.
Mais la polémique ne s’est pas arrêtée là, et ce samedi 21 octobre encore, des messages continuaient à affluer, soutenant la thèse du crime de guerre, ou au contraire celle d’une excusable réaction de soldats français découvrant que d’autres français avaient combattu dans les rangs de l’ennemi. Enfin beaucoup de lecteurs – un peu trop à mon goût- tiennent au passage à saluer la modération de de Gaulle, oubliant l’épuration (et pire encore, son traitement de la fin de l’Algérie française).
Ceci prouve que les clivages français nés des circonstances de la fin de la Seconde guerre mondiale sont encore loin d’avoir disparu, et aussi que cette tranche d’Histoire, par sa complexité même, continue à nous passionner. Sans parler des enjeux idéologiques
Quant au débat sur le qualificatif à donner à l’exécution sans jugement de ces douze jeunes hommes, « l’Histoire est écrite par les vainqueurs », écrit Brasillach dans sa Lettre à un soldat de la classe soixante. Les frères ennemis. Si Napoléon fait un peu exception à cette règle, on peut globalement considérer qu’elle reste en vigueur pour tous les autres cas, et encore aujourd’hui. Sans doute s’appliquera-t-elle aussi aux crimes évidemment terroristes du 7 octobre commis par le Hamas. C’est le pari et l’espoir de Mélenchon, Panot et leurs amis.
Agathon