indignation

Indignations sélectives

Ce lundi 3 juin au théâtre Antoine à Paris, la présidente de l‘Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet sera, avec son homologue du Sénat Gérard Larcher (dont on parle beaucoup comme successeur de Gabriel Attal à Matignon) et la mairesse de Paris Anne Hidalgo, l’une des étoiles de la « soirée de mobilisation L’Europe contre l’antisémitisme » organisée par la revue La Règle du jeu dirigée par Bernard-Henri Lévy. Donc deus ex machina et autre vedette de l’événement aux côtés du grand rabbin de France Haïm Korsia, du président du CRIF Yonathan Arfi et de l’indispensable Patriiiiick Bruel flanqué de l’actrice Sandrine Kiberlain pour la touche people et glamour.

Une présidente à la mémoire courte

En attendant ce grand soir au cours duquel, soyons-en sûrs, la responsabilité de l’« l’antisémitisme d’atmosphère » régnant actuellement sera en priorité attribuée à l’extrême droite, Mme Braun-Pivet s’est distinguée le 28 mai en frappant d’une « censure avec exclusion de 15 jours et privation, pendant deux mois, de la moitié de son, indemnité parlementaire » le député mélenchoniste Sébastien Delogu, qui, pour protester contre la vitrification de la bande de Gaza par l’armée israélienne, avait déployé la veille un drapeau palestinien en plein hémicycle.

Les Insoumis ne cessant de défiler sous des banderoles « Palestine-Kanaky, même combat » alors que la situation et la nature des représailles sont totalement différentes dans les Territoires occupés et en Nouvelle-Calédonie, nous ne pleurerons pas sur les malheurs du camarade Delogu — qui, ancien communiste, claqua la porte du PC en raison de son « manque de diversité ». Et d’autant moins que c’est sous la pression du groupe LFI que, le 4 novembre 2022, le député RN Grégoire de Fournas avait été frappé d’une sanction similaire pour avoir crié « Qu’ils retournent en Afrique ». Les mélenchonistes avaient en effet soutenu que l’apostrophe s’adressait non pas aux clandestins sauvés en mer par SOS Méditerranée dont il était question, mais à l’un des leurs, le Franco-Congolais Carlos Martens Bilongo, élu du Val-d’Oise, qui exaltait l’action de l’ONG.

En tout cas, la présidente de l’Assemblée nationale a la mémoire courte. N’est-ce pas elle en effet qui, bouleversée par le massacre perpétré le samedi 7 octobre par le Hamas — massacre dont, soit dit en passant, Benyamin Netanyahou avait été prévenu le 30 septembre par le Pentagone américain et même le Mossad israélien (1) — était montée le mardi suivant au perchoir en arborant fièrement au revers de sa veste une broche représentant le drapeau israélien ? Elle est donc malvenue d’affirmer désormais que tout emblème étranger est interdit dans la Chambre des députés.

Silence sur le tabassage d’un responsable RN

Mais sans doute y a-t-il des grâces d’état, dont la gauche même ultra profite aussi. L’agression le 5 juin 2023 à Rennes de colleurs d’affiches LFI par des « fascistes armés de battes de base-ball » avait ainsi ému aux larmes, et bien au-delà de la Bretagne, tous les médias, le monde politique et la justice acharnée à retrouver les coupables. Dans la même ville mais le 30 mai 2024, c’est Julien Masson, porte-parole du RN à Rennes, qui a été attaqué par des militants d’extrême gauche alors qu’il distribuait des tracts pour la liste Bardella sur le marché Jeanne d’Arc. Jeté à terre, il a été molesté avec une telle violence qu’il bénéficie de trente jours d’interruption temporaire de travail, ce qui est exceptionnel. Mais, cette fois, quasi-silence de la presse locale, et indifférence générale des milieux politiques.

Ainsi va notre État de droit se revendiquant de l’Égalité dans sa devise.

Camille Galic

  1. https://nouveaupresent.fr/2023/10/12/offensive-du-hamas-netanyahou-savait-il/

Un commentaire

  1. e venais de lire cet article quand, par hasard, je me suis trouvé pris samedi place de la République dans une manif très importante (22 000 personnes selon la police) et je peux témoigner que si la Palestine y tenait la vedette, le martyre infligé à la bande de Gaza était sans cesse associé à celui que subirait la « Kanaky ». Où les agresseurs, tueurs, incendiaires et destructeurs de l’économie locale aujourd’hui ravagée ne sont pourtant pas les « colonialistes ».
    Le prétexte officiel de cette manif intitulée « Pour Clément, continuons le combat », et qui s’est terminée par de violentes échauffourées sur lesquelles les médias sont restés très discrets, était l’hommage annuel au jeune militant gauchiste Clément Méric, « tombé sous les coups des fascistes » (à la suite d’une rixe que ce gringalet de santé très fragile avait lui-même déclenchée) le 5 juin 2013 à Paris. Hommage autorisé par la même préfecture de police qui, en mai dernier, avait interdit le défilé identitaire à la mémoire de Sébastien Deyzieu, tombé du toit sur lequel il s’était réfugié, coursé par les CRS. Finalement autorisé par la justice, ce défilé se déroula et s’acheva d’ailleurs dans un ordre parfait, contrairement à ce qui s’est passé samedi.

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