A la stupéfaction générale, le nombre d’adultes baptisés lors de la vigile pascale ne cesse d’augmenter: 5 423 en 2023, mais 7 135 en 2024 et 10 384 cette année selon la Conférence des évêques de France (CeF). A quoi s’ajoutent les baptêmes d’adolescents, dont le nombre est passé de 2 953 en 2023 à 7 404 en 2025. En tout, ce sont donc 17 788 personnes (dont 4 % de musulmans) qui rejoindront l’Église catholique cette année par le sacrement du baptême
L’ombre d’une revendication identitaire
Ce retour spectaculaire à la foi catholique « interpelle », comme diraient les dinosaures de Témoignage chrétien. S’explique-t-il par l’insécurité intérieure aussi bien qu’extérieure que nous vivons, entre déstabilisation sociale et menaces de guerre ? Par le dégoût d’une société permissive au point de sombrer dans la déliquescence et l’absurdité ? Par l’explosion des familles et la perte de repères qui s’ensuit ? Par la faillite de l’Éducation nationale et la dictature des réseaux sociaux ? Par l’épidémie de Covid et les confinements subséquents qui ont contraint beaucoup d’adultes et d’adolescents à s’interroger sur le vide de leur existence et à aspirer à plus de spiritualité ? Par l’arrivée dans les paroisses de jeunes prêtres plus tradis et donc moins soucieux de l’aggiornamento cher aux pères du concile Vatican II… et au pape François ? Ou encore, horresco referens, par un désir chez les catéchumènes de s’affirmer « catholique et française toujours », comme s’en inquiète La Croix ? Éternel champion du dialogue interreligieux, le quotidien reste dubitatif sinon hostile devant le zèle des baptisés, dans lequel il voit de dangereux « identitaires », espèce particulièrement honnie.
L’arbre qui cache la forêt
À l’opposé du spectre religieux, on s’inquiète aussi, mais pour des raisons inverses. « Au-delà de la joie que tout catholique éprouve à la vue de ces nouveaux fidèles […], on peut se demander si cet afflux ne fait pas apparaître en creux la dislocation de la matrice catholique qui caractérisait la France d’hier », pouvait-on lire ainsi le 14 avril dans le Bulletin de la Fraternité Saint-Pie X, qui estime qu’« un autre facteur éclaire la tendance actuelle : la baisse dramatique des baptêmes d’enfants. Selon les statistiques fournies par la CeF, si en l’an 2000, 380 093 enfants ont reçu le baptême, leur nombre a chuté à 178 388 en 2022 : un effritement que l’augmentation actuelle ne répare pas, loin de là. »
Déplorant « la lente agonie de la pratique dominicale : entre 2 et 4% des Français se sont rendus à la messe tous les dimanches en 2023, et parmi ceux-ci, près de 33% sont âgés de plus de 75 ans quand les 18-24 ans représentent 7,2% des “messalisants” hebdomadaires », le Bulletin estime que, « parallèlement à l’érosion de la pratique religieuse, impossible de ne pas voir la bascule anthropologique qui s’est opérée : comme l’explique le démographe Jérôme Fourquet, en 1974, 48% des Français étaient favorables à l’avortement, contre 77% en 2022. En 1986, 54% des Français voyaient dans l’homosexualité “une manière comme une autre de vivre sa sexualité”, contre 87% aujourd’hui. Quant à la crémation, elle est passée de 0,9% des sépultures en 1980, à 43% en 2023. »
Contre cette « dislocation de la matrice catholique qui a entrainé une forme d’“exculturation” du catholicisme à tous les niveaux de la société » alors que l’islam ne cesse de s’imposer davantage avec la bénédiction de presque tous les gouvernements européens, espérons que les nouveaux baptisés seront le fer de lance d’une Reconquista intellectuelle, morale et religieuse, ô combien cruciale — c’est le cas de le dire.
Camille Galic
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