Dans la cité de Luxembourg-ville (« lux » en bourg, lumière dans la cité) et le duché tout entier, ce si petit État si gros d’argent, tout est propret, tout est clean, tiré au cordeau, sauf le cours des rivières qui sinuent et l’enorgueillissent. Si la ville est cosmopolite, presque tous les badauds sont blancs, policés, urbains, élégamment vêtus tels des marchands cossus, sans traces de terre sur leurs chaussures et probablement sans trous à leurs chaussettes.
Si les gens parlent, ils le font avec discrétion sur leur téléphone portatif à écrans lumineux. Ils s’affairent d’un pas mesuré d’un magasin de luxe l’autre où l’on vend des parfums, du velours, de la toile de Nîmes (cité à laquelle l’on doit le « Denim » si nécessaire à la confection des « jeans » vêtement qui sied si bien à Chard), des montres au prix certainement exorbitant, inaccessible à première vue (puisque non indiqué en vitrine). Des Rolex ? je ne sais pas… Séguela, Jacques de son prénom (vous vous rappelez vaguement ce gars là ?) affirmait que, démuni de ce hochet passé la cinquantaine, on aurait raté sa vie. Je n’ai jamais eu pourtant de bijoux, ni bague, ni chaîne au poignet, pareillement à mon ami Tournebroche dont je cite ces vers, et moins de montre encore.
Le poète écrivait que les enfants avaient toujours besoin d’une fleur (L’enfant honneur) mais ici les mioches munis de lampions appelés aussi «Liichtebengelcher», réclament à la Chandeleur, après la fin de l’école, de maison en pénates, de porte en huis, des bonbons et des sous. Généralement, ces troupes sont formées par des momignards qui habitent le même quartier ou une même rue. Hélas leur sabir est inaudible, pire que le suisse-allemand (Schwi(i)zerdü(ü)tsch, Schwy(y)zerdütsch, Schweizerdeutsch, à vos souhaits ! Mais ce sont des enfants, et des enfants qui chantent : « Léiwer Härgottsblieschen, Gitt ons Speck an Ierbessen Ee Pond, zwee Pond, Dat anert Joer da gitt der gesond, Da gitt der gesond. Loosst déi jonk Leit liewen ». Ils quémandent littéralement des petits pois et du lard comme les nécessiteux et les mendiants du temps de François Villon. Les nostalgiques (Salut Marc Augier) trouveront leur bonheur de bonbons anciens sur le site violette-berlingot.com qui commercialise des douceurs sous la forme de petits pois et lardons acidulés.
Mais célébrons la Chandeleur, quand quarante jours après sa naissance, le petit Jésus est présenté au temple (dont il chassera plus tard tous les marchands). C’est la fin du cycle de noël. On range traditionnellement à la Chandeleur la crèche et les santons dans leurs boites. Dans les temps les plus lointains, à Rome, le 2 février était consacré à Cérès, déesse des moissons. En son honneur, on promenait dans les rues des lumignons et des chandelles allumées. Tout continue, rien n’a de fin. Les enfants apportent leur joie, leur cœur, leur innocence, l’étincelle… Peut-être sonneront-ils, en songe, à votre porte et chanteront-ils la chanson traditionnelle de saint Blaise ? La ville, son donjon et ses clochers sont installés sur de solides remparts surplombant l’Azette et la Pétrusse. Tout n’est que luxe, calme et forêt qui cerne tout l’ensemble et parait même sortir des profondeurs de la ville-basse où se cachent galeries souterraines et la crypte archéologique fondatrice.
Informations utiles :
Tous les transports en commun (bus, tram, train) sont gratuits dans le Duché. Les water-closets publics sont gratuits, propres, rutilants, bien éclairés, avec de belles dimensions et une belle hauteur de plafond, radiateur électrique à toc et musique classique en sourdine. Le tabac est beaucoup moins cher qu’en France (il est vendu surtout sur les aires d’autoroute). On peut présentement s’approvisionner à hauteur de : une cartouche (200 cigarettes), 50 cigares, 100 cigarillos et 250 grammes de tabac à fumer par personne, mais quatre fois plus, légalement d’ici l’été 2024.
Franck Nicolle