C’est ce 5 avril qu’Emmanuel Macron se rendra en Chine mais, pour une fois, sans Brigitte dans ses bagages. Il sera accompagné d’Ursula Von der Leyen. Choix qui, selon France Info, relèverait de la logique pure : « D’un point de vue commercial, l’Union est devenue le principal partenaire commercial de la Chine. Ce pays, premier marché au monde avec 800 millions de consommateurs à horizon 2030, est la deuxième destination des produits européens, après les Etats-Unis : les exportations européennes vers Pékin ont augmenté de 76% entre 2011 et 2021. Mais c’est dans l’autre sens que la progression est la plus spectaculaire, puisque les importations chinoises vers l’Europe ont quasiment doublé en 10 ans. »
Marlène la disruptive
Le binôme Manursula obtiendra-t-il du président Xi Jinping un rééquilibrage plus favorable ? On peut en douter mais ce qui est sûr est que ce voyage présenté par l’Élysée comme historique sera éclipsé en France le lendemain par un événement fort dommageable pour le Pouvoir : l’apparition de la grassouillette Marlène Schiappa dans une robe d’un blanc virginal mais aussi décolletée que transparente à la une du magazine Playboy auquel elle a accordé quatre pages d’interview. Y apprendra-t-on pourquoi, secrétaire d’État secrétaire d’État chargée de l’Économie sociale et solidaire, elle avait l’hiver dernier, sous prétexte d’un congrès, passé « plusieurs semaines à New York » ? Où elle fut d’ailleurs frappée d’un coup de foudre — pour Matthias Savignac, président de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale (MGEN). Dossier relevant de ses attributions et dont elle a dû se déporter en catastrophe pour le transmettre à Elisabeth Borne qui, prise hic et nunc par des préoccupations ô combien plus urgentes et d’ailleurs jamais informée de l’initiative prise par Schiappa, ne décolère pas. De même que la plupart des autres ministres et des élus de la majorité présidentielle qui estiment, comme la locataire (en disgrâce, dit-on) de Matignon, que « ce n’est pas du tout approprié, à plus forte raison dans la période actuelle ».
Car cette interview, présentée comme « disruptive » par les fidèles de celle qui, sous le pseudo de Marie Minelli, a publié une vingtaine d’histoires et de manuels érotiques aux éditions de la Musardine, tombe mal, très mal. Le même 6 avril est en effet prévue la onzième grande journée de lutte contre la réforme des retraites dont, après le léger reflux (pas des violences mais des participants) enregistré le 30 mars, les syndicats espèrent une mobilisation réussie.
Les humeurs de Sophie
Ce qui n’est peut-être pas gagné, en ce qui concerne la CGT, après l’élection surprise le 31 mars au congrès réuni à Clermont-Ferrand de la très BCBG (en apparence) Sophie Binet — qui ne comptait même pas parmi les favoris — en remplacement de Philippe Martinez.
Déjà, le choix de ce dernier était mal passé en 2015, car il était technicien — et non ouvrier — chez Renault, même s’il venait du Parti communiste et arborait la moustache de Staline. Mais sa remplaçante, elle, vient du PS via l’UNEF. Conseillère principale d’éducation, elle a donc le statut de cadre (elle est d’ailleurs, depuis novembre 202I, secrétaire général de l’Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens CGT) et, loin de l’amélioration des conditions de vie et du pouvoir d’achat des classes populaires, son objectif majeur semble être la disparition d’une France qu’elle juge « trop compartimentée, trop sclérosée » et finalement trop blanche et trop machiste. En symbiose avec son amie Caroline de Haas (Osez le féminisme !) et le collectif #NousToutes, elle avait piloté en 2018 à la CGT le Collectif femmes mixité puis réussi en 2022 à se faire nommer au Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. Instance créée par Jean-Marc Ayrault alors Premier ministre de François Hollande et toujours placée sous l’autorité du Premier ministre en place, où elle devrait siéger jusqu’en 2025.
Une bobourgeoise pour dédiaboliser et moderniser la CGT
Si l’on ajoute que, contrairement à Georges Marchais qui, en 1981, se vantait de « poser le problème de l’immigration » et concluait à son nécessaire arrêt, Mme Binet a pour les migrants les yeux de Chimène et, en poste à Marseille, qu’elle s’intéressait quasi exclusivement aux quartiers Nord à forte dominante allogène, au nom de l’inclusion dans tous les domaines, on conviendra qu’elle mérite bien l’appellation de « bobourgeoise » que lui a attribuée un confrère de Breizh Info. Ce que n’apprécie pas nombre de cégétistes qui, puisqu’il fallait absolument élire une femme pour être dans le vent mais craignant une « remise en question de l’identité » de la centrale, avaient voté pour Céline Verzeletti, ancienne gardienne de prison mais élevée au biberon coco par un père cheminot CGT, passée par les Jeunesses communistes et toujours encartée au PC — comme le seul homme candidat, Olivier Mateu, petit-fils de Rouges espagnols à l’instar de Philippe Martinez. Ceux-là sont donc restés bras croisés et faisaient grise mine quand fut annoncée l’élection de Binet.
Si l’appareil a choisi celle-ci, c’est dans l’espoir qu’avec son profil consensuel, elle séduira une nouvelle « force militante » et vengera ainsi l’humiliation subie lors des dernières élections syndicales, quand la CGT perdit son titre de plus grand syndicat de France (titre d’ailleurs illusoire, seuls 10 % des actifs étant syndiqués en France) au profit de la CFDT.
Mais cette dernière avait régressé après avoir jugé tactiquement judicieux de porter à sa tête une femme, Nicole Notat — grande première dans les annales du syndicalisme. Vu ses origines sociétales et ses options sociétales, on aurait très bien vu Sophie Binet à la FSU ou à Sud. Va-t-elle rajeunir, féminiser et dynamiser la CGT ou au contraire accélérer son déclin ?
Reste — parole de femme ! — que choisir un ministre ou un dirigeant en vertu de sa seule appartenance au beau sexe (alors, paradoxalement, qu’il n’est désormais question que de genre) reste un pari à hauts risques.
Camille Galic