Après une croissance économique poussive à 0,8% en 2023 et une perspective à 0,2% pour les deux premiers trimestres de cette année, le cap fixé par Bercy à 1,4% semble relever sinon de la folie douce tout au moins d’un optimisme de façade un rien excessif. Mais c’est l’usage et la convention et chaque année l’exécutif se croit ainsi obligé d’annoncer des objectifs inatteignables auxquels aucun observateur sérieux n’accorde le moindre crédit mais qui ont l’heur de flatter dans le sens du poil milieux financiers et citoyens. Un peu comme ces vœux qui chaque année vous augurent inlassablement fortune, amour, santé et bonheur.
Nous devrions assister cette année à une stagnation persistante de la consommation sur fond d’atonie de la production industrielle, d’une grande modération de l’investissement des entreprises et d’une aggravation de leur taux de défaillance qui devrait, selon la Banque de France, atteindre un sommet. Rappelons en passant qu’en la matière le quatrième trimestre 2023 aura été le pire depuis une trentaine d’années. Le tout dans un contexte d’inflation, certes un peu plus modérée que celle de ces deux dernières années, et de ralentissement global du commerce mondial.
L’inébranlable optimisme de notre ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, influera-t-il, même à la marge, sur l’érosion de nos parts de marché à l’exportation ? On peut en douter si l’on se réfère au déficit commercial historique de 2022 et à la désindustrialisation en profondeur de la France considérée aujourd’hui, très officiellement, comme dotée d’une économie de services.
Ajoutons à cela le ralentissement observé dans l’immobilier avec un effondrement de la construction des logements neufs, le coup de frein sur l’immobilier, la prévisible baisse du marché auto présagée par l’Association des constructeurs européens d’automobiles escomptant une croissante de 2,5% des nouvelles immatriculations dans l’Union européenne contre 12% en 2023.
Le contexte international et la convergence des difficultés et dangers ne sont évidemment pas étrangères à ces perspectives et à la nouvelle donne du monde multipolaire qui vient. C’est dans la tempête que l’on évalue les bons capitaines et leur capacité à prendre les bonnes décisions au bon moment. 2024 sera-t-elle « l’annus horribilis » de notre ministre de l’Economie au, au contraire, une opportunité de premier choix de faire preuve de ses talents ?
Arnaud Raffard de Brienne